Marie, partenaire d’Alliance
Début décembre, nous fêtons l’Immaculée Conception : nous chantons Marie, nous prions Marie, nous fleurissons Marie. Les Marianistes, fidèles au P. Chaminade, ajoutent chaque jour un verbe : « renouvelons ensemble notre Alliance avec Marie !» L’anneau d’or que les religieux portent à la main droite signifie que cette Alliance fait partie de leur identité charismatique.
La Bible parle de l’Alliance que Dieu a établie avec les hommes et plus particulièrement avec le peuple hébreu, pour partager avec lui ses projets, sa sagesse, son amour, sa joie ; les chefs politiques – et économiques – s’allient pour être plus forts ; les époux s’engagent l’un envers l’autre devant témoins et scellent cet échange par un anneau-alliance ; et le P. Chaminade propose à ses disciples, à commencer par les Congréganistes de la Madeleine (Bordeaux), de faire une alliance avec Marie, d’entrer dans une relation sponsale avec Elle. Il privilégie cette symbolique au temps de la fondation de la Société de Marie, après 1815.
En effet, quand il a voulu motiver ses disciples en vue de la fondation d’un ordre religieux, Chaminade leur a présenté la vocation marianiste comme une « alliance avec Marie ».
Il construisait sur la base de la pratique déjà bien ancrée dans la Congrégation de la Madeleine : le renouvellement des promesses du baptême, comme expression d’un engagement conscient et adulte envers Dieu. Prêtre de la ville, Chaminade propose ainsi une démarche pastorale bien adaptée à une population urbaine, plutôt cultivée, les uns vivant proches des autres, prompts à analyser les problèmes sociaux et moraux et disposés à travailler ensemble pour les résoudre.
A l’époque de la fondation de la Société de Marie (1817-19), le P. Chaminade fait des conférences de retraites sur « l’alliance avec Marie ». Tout comme Dieu a fait alliance avec Abraham, Josué et Moïse, pour former un peuple choisi, chargé d’une mission spéciale dans l’histoire du monde, ainsi, dans la France postrévolutionnaire, explique Chaminade, Dieu inspire à des groupes de personnes de faire alliance avec Marie, pour répondre aux grands besoins des temps modernes. Les Marianistes sont appelés à former un peuple voué totalement, consciemment et explicitement, à vivre cette alliance missionnaire, en disciples de Marie.
Chaminade se situe ainsi dans la suite des penseurs et des saints du 18e siècle qui, comme Louis Marie Grignion de Montfort, ont cherché à entraîner les fidèles dans une dévotion spéciale envers Marie, apostolique et active, comme une manière de lui témoigner leur amour et leur fidélité et de stimuler leur motivation apostolique. Après lui viendront Maximilien Kolbe, Frank Duff, Jean-Paul II…
Le Fondateur a proposé l’alliance avec Marie comme une manière d’exprimer un dévouement généreux à la cause de Marie qu’il voulait encourager.
Pour éviter les ambiguïtés de la notion de « consécration à Marie », les partisans d’une relation forte à Marie ont eu recours à diverses images pour exprimer le lien engageant avec Marie qu’ils voulaient promouvoir. Montfort a parlé de « saint esclavage », Kolbe de « milice de Marie », Frank Duff de « légion de Marie », Jean-Paul II proposait de « se confier tout entier à Marie ».
La notion d’« alliance », préférée par Chaminade, est plus scripturaire et souligne le choix libre que fait le fidèle (à l’opposé de l’esclave) ; il traduit l’appel à une relation fondée sur l’amour plus que sur l’obéissance à un commandement (comme dans une milice ou une légion), il incite à jouer un rôle actif, à prendre des initiatives (alors que « se confier » est plus passif).
Rappelant l’histoire du peuple choisi que raconte la Bible, le concept d’alliance nous fait penser à une mission collective, partagée avec d’autres missionnaires de Marie, et renvoie au « peuple de saints », plutôt qu’à un engagement purement individuel et privé. On est invité à imiter Jésus, fils de Marie et à prendre des engagements actifs et communs pour le service du Royaume de Dieu.
En proposant l’« alliance avec Marie », Chaminade enrichit et approfondit la spiritualité moderne. Puisse-t-il entraîner de nombreux apôtres appelés à se consacrer à Marie et à la mission dans le monde de notre temps !