A l’étude chacun choisit sa place suivant ses affinités, le plus loin possible du surveillant, car le voisinage immédiat de la chaire est une zone dangereuse que tout le monde voudrait éviter. On recherche avant tout les bureaux à coffre. On y loge plus de butin et on y dissimule mieux la fraude. Les autres, les bureaux plats, sont pout les gosses, les naïfs ou les derniers arrivés.
Mais hélas, ce choix n’est pas définitif, 3 ou 4 jours après la rentrée le chef d’étude assignera à chacun sa place. Des règles immuables président à cette répartition : 2 élèves de la même classe ne sont jamais placés côte à côte, les Participes font l’office de cloison étanche, on les intercale entre les Classiques et les Bestiaux.
Les études sont coquettes, elles font plaisir à voir, repeintes à neuf ainsi que les tables. Ces dernières mal vernies, poissent délicieusement pendant un bon mois. Mais on ne tarde pas à les gratter, à les user et à en faire reparaitre les vieilles inscriptions qu’y ont gravées les générations précédentes.
La petite chapelle de la Vierge, qui orne chaque étude, a reçu des embellissements variés suivant le goût du nouveau surveillant. Le père Volant affectionnait les décors de papier découpé, le père Claudel les fleurs artificielles et les pommes de pin, le père Fuinel se contentait d’un coup de badigeon bleu de Prusse pour simuler l’azur et le père Surmély faisait des cathédrales gothiques en bois découpé.
Les tableaux eux-mêmes étaient fraichement noircis, à l’exception de celui de l’étude des Grands qui était garni de toile cirée. C’était « la planche » où l’on venait « chiffrer » pour échapper à l’ennui mortel des veillées et à la somnolence des digestions pénibles.
SOUVENIRS DE ST REMY HTE SAONE, (E.BERGERET) n°10, 1908, pp. 16-17, 29/10/14