Seigneur, pourquoi m’avez-vous dit
d’aimer tous mes frères les hommes ?
J’ai essayé, mais vers vous je reviens effrayé..
Seigneur, j’étais si tranquille chez moi,
je m’étais organisé, je m’étais installé.
Seul, j’étais d’accord avec moi-même,
à l’abri du vent, de la pluie, de la boue…
Je serai resté pur, enfermé dans ma tour.
Mais vous m’avez forcé à entr’ouvrir la porte.
Comme une rafale de pluie en pleine face,
Comme une bourrasque, une amitié m’a ébranlé.
Et j’ai laissé une porte entr’ouverte…
Les premiers sont entrés chez moi, Seigneur;
il y avait tout de même un peu de place en mon coeur.
Jusque-là, c’était raisonnable.
Mais les suivants, Seigneur, les autres hommes, je ne les avais pas vus derrière les autres.
Ils étaient nombreux, ils étaient misérables ;
ils m’ont envahi sans crier gare,
il a fallu faire de la place chez moi.
Plus ils poussent la porte et plus la porte s’ouvre.
Ah ! Seigneur, je suis perdu, je ne suis plus à moi.
Il n’y a plus de place pour moi chez moi.
»Ne crains rien, dit Dieu, tu as tout gagné.
Car tandis que ces hommes entraient chez toi,
Moi, ton Père, moi,ton Dieu,
je me suis glissé parmi eux. »
Michel Quoist