Il y a la nuit et ses ombres géantes qui, aux détours imprévus de nos heures, font parfois s’assoupir l’espérance…
Il y a l’obscurité dense et tenace qui, sans crier gare, vient comme un voile nous endeuiller le cœur…
Il y a le crépuscule de Dieu qui s’abat, comme un glaive, sur notre foi qui s’essouffle à gravir ses petits Golgotha…
Et nous voici fatigués, usés, blessés, isolés, déboussolés, crucifiés dans ce désert nocturne où notre âme assoiffée, brûlée, clouée, tend désespérément les mains vers une aube qui tarde…
Qui n’a connu la nuit, ne connaît pas le jour…
Qui n’a connu le doute, ne connaît pas la foi…

Même toi, Jésus ! Même toi, le propre Fils de Dieu, tu hurles, sur le bois de ta croix, devant l’apparent abandon de ton Père : « Eloï, Eloï, lama sabachthani

Osons-nous l’avouer : la foi en Ton Amour, nous ne l’avons que parfois, nous ne sommes croyants que par intermittence. Au calendrier de notre espérance, nous sommes si souvent Vendredi Saint… Tant de fois nous pourrions faire nôtre ce mot de Bernanos : « La foi ? Vingt-quatre heures de doutes moins une minute d’espérance…

Mais il nous faut franchir le gué de la nuit. Croire, malgré le poids des jours sans jour et sans lumière, à cette minute, cette toute petite minute, ces soixante pauvres secondes où l’espérance vient rouler la pierre des tombeaux de nos vies.
C’est un dur métier, Tu le sais bien, Seigneur, que d’essayer de vivre. « Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard« , chantait le poète.
Il y a l’amour qui cherche à aimer et qui retombe si souvent dans ses ornières.
Il y a la parole qui cherche à dire et à se dire et qui, tant de fois s ‘enferme dans ses mutismes…
Il y a les gestes, les gestes tendres et fraternels, qui voudraient ouvrir le cœur à l’autre, le frère, la sœur et qui passent et repassent leur chemin sans offrir un regard.
Il y a les rêves, les projets, les belles utopies, tant d’appels de l’Esprit qui s’étouffent sous le poids des habitudes, des prétendues obligations et des conforts meurtriers.

Pâques : heureuse minute où il nous est donné de croire que tout est encore possible, que nos existences, quelles qu’elles soient, peuvent se remettre debout, choisir enfin la liberté.
Pâques : bienheureuse minute où la nuit cède enfin le pas aux premières lueurs de l’aube.
Pâques : temps béni où nous pouvons enfin nous risquer à devenir ce que nous sommes : des marcheurs, des nomades, des aventuriers, les yeux rivés vers la Terre promise de notre propre résurrection.

Viens, Seigneur ! Viens, Esprit consolateur, abattre l’arbre mort de nos doutes, où Tu gis, inerte et crucifié.
Viens, Esprit créateur, habiter notre cœur pour mieux nous relever de l’intérieur.
Écarte, de Ton Souffle, la cendre de nos vies et viens attiser la braise de notre espérance. Sois pour nous Parole qui guérit, Lumière qui éclaire, Amour qui transfigure.
Viens, Seigneur, nous murmurer à l’âme que, déjà, Tu es là !

Bertrand Révillon (Panorama, Avril 2001)

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