L’indifférence religieuse, de Chaminade à nos jours

L’ACTUALITÉ DE LA PROPOSITION DE FOI DU BIENHEUREUX CHAMINADE

INTRODUCTION

« Le siècle le plus malade n’est pas celui qui se passionne pour l’erreur, mais celui qui oublie et méprise la vérité. Il reste encore de la force, et donc de l’espérance, tant qu’on ressent des secousses violentes, mais quand tout mouvement s’éteint, quand cesse de battre le pouls et que le froid saisit le cœur, que peut-on espérer sinon une prochaine et inévitable dissolution? Il serait inutile de le dissimuler, la société européenne avance rapidement vers cette fin fatale. Le symptôme le plus épouvantable qui s’offre à l’observateur est-ce que ce ne sont pas les rumeurs qui résonnent à l’intérieur, les secousses qui le tiraillent, mais cette indifférence léthargique, cet assoupissement si profond dans lequel nous allons tomber, et qui nous en libérera ? »[1]

Ce texte de l’auteur de L’Essai sur l’indifférence en matière de religion, Félicité de Lamennais, peut nous aider à présenter l’objet du présent exposé : l’indifférence religieuse. Comme un prophète qui recherche les signes de son temps, Lamennais, qui fut un des premiers à employer cette expression « indifférence en matière de religion », sut voir que son époque, marquée par le déisme et par les attaques faites à la religion et à la structure ecclésiale catholique, s’acheminerait vers cette « indifférence léthargique et ce profond assoupissement » face au fait religieux, qui caractérise le phénomène religieux à la fin du XXe siècle et au début du XXIe.

Le plus grand mal ne serait pas la critique faite à la religion, la relativisation des confessions religieuses ou l’offre d’une religion rationnelle, mais l’indifférence et l’assoupissement face au fait religieux.

Là, la religion survit même comme problème et elle est présente dans la vie des personnes et de la société, même si c’est pour la remettre en question, l’affirmer ou la nier; mais, dans l’indifférence, on ne l’affirme pas, on ne la nie pas, on ne la questionne pas non plus.

Simplement on est là, et qu’importe si Dieu existe ou non. Ni la religion, ni la foi n’ont une influence sur la vie des personnes. Plus qu’une mort de Dieu, propre à l’athéisme du XIXe siècle, il semble qu’aujourd’hui on ait éliminé la transcendance[2]. Il n’y pas d’autre réalité sûre que celle de notre monde d’ici-bas et peu importe qu’il y ait ou non une autre vie et un Dieu qui garantisse le salut éternel. Parce que la chose la plus urgente c’est d’accomplir cette vie terrestre qui nous est échue, de la meilleure façon possible.

L’objet de cet exposé est de présenter le développement de l’indifférence religieuse de Chaminade à nos jours. Comme ce concept a connu une évolution sémantique au cours cette période, nous avons divisé notre exposé en deux grandes parties: l’indifférence religieuse aux XVIIIe et XIXe siècles et l’indifférence religieuse aujourd’hui. En premier lieu, nous avons essayé d’expliquer ce que l’on entend par cette expression dans chacun de ces deux moments, pour ensuite signaler quelques facteurs qui l’ont provoquée.

Dans un second temps, nous avons présenté quelques-unes des réponses que l’on peut apporter à ce phénomène aujourd’hui. Ici nous n’avons pas distingué les deux périodes puisque nous référant à la réponse que Chaminade donna en son temps, nous avons essayé de proposer quelques pistes pour maintenant, l’objet final du débat qui suivra. En effet, si nous analysons l’histoire, ce n’est pas seulement pour la connaître, mais pour essayer de répondre à la situation que nous vivons aujourd’hui.

Étant donné les limites de cet exercice, il ne nous est pas possible d’effectuer une présentation détaillée du phénomène et nous nous voyons obligés de désigner et de suggérer simplement quelques causes et quelques réponses possibles sans pouvoir les embrasser toutes, car cela exigerait une explication et une argumentation beaucoup plus longues.

Il convient donc de considérer que bon nombre des idées que nous allons exposer ont comme arrière-fond notre étude sur l’indifférence chez Chaminade[3], dans laquelle on peut trouver, davantage développée, quelques-unes des idées que nous allons évoquer ici.

L’indifférence religieuse

A l’époque du P. Chaminade

Concept

Au moment de présenter l’indifférence religieuse aux XVIIIe et XIXe siècles, nous allons expliquer ce que, à notre avis, Chaminade désignait par cette expression, ainsi que d’autres nuances qui, même si elles n’ont pas été recueillies par lui, étaient quand même comprises dans la signification qu’avait alors ce terme.

Le 15 août 1832, le pape Grégoire XVI publiait son encyclique Mirari Vos. Sur les erreurs modernes, dans laquelle il condamnait « l’indifférentisme religieux » qu’il définissait comme « cette opinion funeste répandue partout par la fourbe des méchants, qu’on peut, par une profession de foi quelconque, obtenir le salut éternel de l’âme, pourvu qu’on ait des mœurs conformes à la justice et à la probité. » (MV 9).

Deux siècles auparavant, avec l’apparition de la Réforme protestante et de l’Église anglicane, le christianisme avait été divisé en quatre branches. Cette diversité religieuse, qui avait conduit à ce que l’on appelle les Guerres de Religion et qui avait divisé l’Europe, posait un problème théologique et existentiel, du fait que l’on ne savait pas clairement quel était le vrai chemin vers le salut, si nous tenons compte du fait que toutes prétendaient à la vérité et à l’exclusivité.

Ce fait porta les penseurs des Lumières à défendre une religion naturelle antérieure, libre de tout dogme, fondée sur la raison, et qui serait le chemin du salut pour les hommes, relativisant ainsi les religions positives qui ne seraient que des manifestations de cette religion naturelle.

Comme conséquence surgit « l’indifférentisme religieux, qui n’est pas encore l’indifférence religieuse d’aujourd’hui, mais une indifférence vis-à-vis des contenus divers des diverses confessions chrétiennes »[4]. Par conséquent, aux XVIIIe et XIXe siècles « indifférence » ou « indifférentisme » désigne l’appartenance aux religions positives, comme moyen de salut, que l’on appartienne à l’une ou à l’autre, étant donné que toutes sont l’expression d’une religion supérieure, dont elles procèdent, et qui est fondée sur la raison commune à tous les hommes, et non sur la foi d’où naissent les différences.

A notre avis, cette acception de l’expression « indifférence religieuse » ne se retrouve pas chez Chaminade, lequel, s’il fait référence au protestantisme et essaye de le combattre ; il réagit surtout devant la perte de foi qui sévissait en France à cause de la diffusion des idées des philosophes qui, ou bien défendaient la religion naturelle ou bien critiquaient durement le catholicisme, et sa manifestation politique avec la Révolution Française, ce qui le conduisit à consacrer tous ses efforts à rechristianiser la France postrévolutionnaire.

Si nous tenons compte de ses écrits nous pensons que Chaminade, par l’expression « indifférence religieuse », veut désigner la situation personnelle et sociale de perte de foi et de corruption de la pensée et du cœur qui résulte de la philosophie des Lumières. Par conséquent, quand Chaminade l’emploie, il veut parler de cette situation dans laquelle la foi disparaît, s’est perdue au profit de la corruption de la pensée et de la morale.

L’indifférence religieuse, selon Chaminade, englobe donc trois aspects différents, mais intimement liés.

En premier lieu, l’expression s’applique aux personnes ou à la société dans laquelle la foi n’est plus présente, tant au niveau personnel que social.

En second lieu, elle s’applique à ce type de raison qui est malade pour avoir proclamé son autonomie vis-à-vis de n’importe quelle instance, même la foi, en considérant qu’elle est la seule à pouvoir se guider.

Et en troisième lieu, elle se réfère à la corruption de la morale[5], car une pensée qui se croit autonome et considère qu’elle n’a pas besoin de l’aide de la foi, est une pensée malade, qui ne peut conduire qu’à une action moralement incorrecte, c’est-à-dire que la corruption de l’esprit qui se produit quand la raison n’admet pas la foi comme guide, ne peut conduire qu’à la corruption du cœur.

Même si l’on assiste aux XVIIIe et XIXe siècles à des attaques directes contre la foi et la religion, surtout en France, il s’agit, en réalité, plutôt de défendre le déisme et l‘athéisme ; Chaminade cible lui aussi la conception contemporaine de l’indifférence religieuse quand il parle d’un certain oubli de Dieu qui coïncide avec ce qu’aujourd’hui nous appelons un « athéisme pratique » et qui trouve une de ses causes dans le déisme, comme nous l’expliquerons plus loin. Déjà Chaminade distingue les athées théoriques, qui nient explicitement l’existence de Dieu, des athées pratiques qui, sans nier l’existence de Dieu, mènent leur vie comme si Dieu n’existait pas, comme nous pouvons le remarquer dans le texte suivant: « Credere opportet accedentem ad Deum, quia est (Hb.11,6).

Celui qui veut s’approcher de Dieu doit croire qu’il existe. N’avoir Dieu ni dans l’esprit, ni dans le cœur par une foi sincère, l’oublier ou le méconnaître, n’est-ce pas un vrai athéisme? Sans doute il ne s’agit pas d’un athéisme impie et déclaré mais bien d’un athéisme pratique et des mœurs. Même s’il ne va pas jusqu’à une guerre déclarée contre l’existence de Dieu, ne conduit-il pas à tous les péchés? Y-a-t-il jamais eu un jour de pécheur qui n’ait pas commencé par oublier Dieu? »[6]

Causes

a-. La sécularisation du réel

L’époque de Chaminade est marquée par l’application des idées défendues par les philosophes des Lumières, qui se concrétisèrent dans la Révolution française, ce qui – nous semble-t-il – provoqua un changement culturel total qui contribua fortement à l’émergence de la situation actuelle du fait religieux. C’est intéressant de remarquer que ces idées ne se limitèrent pas à une élite intellectuelle, mais qu’elles pénétrèrent dans toutes les strates de la société, en modelant l’esprit et l’action des personnes de l’époque « comme si elles étaient entrées dans le sang des français »[7] Comme nous ne pouvons pas nous arrêter à expliquer la pensée des Lumières, qui déborde l’objet de notre exposé, nous nous contenterons ici d’exposer les éléments qui ont influencé d’une manière décisive le fait religieux.

Les Lumières se caractérisent par l’énorme importance donnée à la raison, essayant de l’ériger en juge de toute la réalité, dans la lutte contre la superstition et le mythe ; il s’agissait d’une tentative pour transformer tout le réel et la société, pour faire le bonheur de l’être humain. Nous ne devons pas perdre de vue les deux éléments suivants: d’une part les Lumières ont poursuivi une réforme de tous les domaines de la réalité, d’autre part, leur objectif était la vie de l’homme pour qu’il puisse être heureux, comme on le voit dans l’Encyclopédie, œuvre qui peut être considérée comme l’expression même de la pensée éclairée: « L’objet d’une Encyclopédie c’est de réunir toutes les connaissances dispersées sur toute la face de la terre(…) afin que (…) nos petits-enfants bien mieux instruits, soient à la fois plus vertueux et plus heureux »[8]

Les penseurs des Lumières voulaient que l’homme atteigne véritablement sa majorité, comme le rappelle Kant lorsqu’il la définit comme la sortie de l’homme de son statut de mineur qui le contraint à toujours s’auto-culpabiliser, en exerçant sa raison, avec sa célèbre devise Sapere aude [9]. Le bonheur que recherchaient les Lumières était vraiment un bonheur immanent. C’était «un projet d’émancipation qui voulait sauver l’homme à travers l’homme, en niant les effets de la grâce et en reléguant Dieu dans un rôle lointain et isolé, de simple spectateur».[10] Nous voyons bien là le caractère sécularisant des Lumières.

Lorsque nous parlons de raison éclairée, nous devons tenir compte du fait que nous parlons d’une raison critique, empirique et mathématique qui coïncide pratiquement avec la méthode scientifique moderne. Le problème c’est que ce modèle de raison est s’absolutisé et transformé en rationalité, de telle sorte qu’aujourd’hui nous pouvons dire que le moyen de lutter contre le mythe s’est, à son tour, transformé en nouveau mythe, s’isolant ainsi de toute critique et se présentant comme le critère absolu de réalité et de vérité.

Une manière de concevoir la raison qui s’est présentée comme étant la Raison elle-même. Il ne fait pas de doute que cela a été provoqué par les succès qu’a obtenus l’application de cette rationalité à la nature, conduisant à un développement scientifique et technique sans précédent en un bref laps de temps ; les conditions de vie des personne se sont améliorées, la nature ayant pu être mieux connue, dominée et transformée. L’euphorie de ces conquêtes fit croire que nous nous trouvions devant le modèle de la vraie connaissance qui devait être appliqué à tous les aspects de la réalité pour les transformer et améliorer la vie: la politique, la morale, l’économie, la société, le droit et la religion elle-même.

Voilà comment intervient un processus de sécularisation qui désacralise la réalité et qui fait de Dieu une simple hypothèse inutile, étant donné que la raison immanente peut connaître, expliquer, transformer et diriger les divers champs de la vie sans avoir besoin de Lui ni d’aucune transcendance, passant ainsi au droit et à la morale naturelle, à la politique fondée sur le contrat social, à la chute de l’Ancien Régime et à la religion naturelle.

Quand Chaminade dit que le philosophisme est un délire ou une pensée malade qui conduit à la corruption de l’esprit et du cœur, il fait allusion à cette raison autonome et absolue qui s’est émancipée de tout guide, même de celui que constitue la foi. Pour Chaminade c’est une erreur parce que la raison humaine est blessée par le péché et a donc besoin de la foi. Voilà pourquoi toute tentative de la raison de se conduire par elle-même débouche sur l’erreur. Nous pouvons observer ici que nous ne nous trouvons pas face à un problème religieux, mais à un problème anthropologique, car nous sommes en train de défendre deux conceptions de l’être humain totalement opposées.

Nous pensons que ce processus de sécularisation, qui défend l’autonomie des réalités terrestres, lesquelles peuvent être expliquées par la seule raison naturelle, est un facteur qui, avec le temps, conduira à l’indifférence religieuse telle que nous la comprenons aujourd’hui puisque, sans nier l’existence de Dieu, fait que la science ne peut ni affirmer ni nier, elle explique la réalité et son fonctionnement sans se référer à Lui, en le faisant disparaître de l’horizon de vie immédiat des personnes.

Le CV II en GS 36 reconnaît aussi l’autonomie de la réalité terrestre, qui se situe dans la ligne de la sécularisation, mais il avertit du risque que cette autonomie ne soit conçue comme une indépendance qui exclut le Créateur, comme cela est déjà arrivé.

b-. Le déisme et la religion naturelle

Comme nous venons de le dire, les penseurs des Lumières revisitèrent et firent la critique de tous les aspects de la vie. La religion, comme une réalité de notre culture parmi d’autres, devait se soumettre à l’analyse critique de la raison si elle voulait continuer à prétendre à la validité. La nouvelle raison fit donc le procès de la religion, pour essayer de l’adapter à la nouvelle situation culturelle.[11]

Ici, nous nous limiterons à exposer la doctrine déiste, en laissant de côté toute la critique explicite dirigée contre la foi et la révélation que, surtout certains penseurs éclairés français adressèrent à la religion révélée, essentiellement au catholicisme, qu’ils tentèrent d’éliminer.

Si nous pensons que cet examen de la religion s’effectue à partir d’une raison empirico- mathématique, nous pouvons comprendre immédiatement que la religion révélée se retrouva dans une impasse: si elle ne se soumettait pas à cet examen, elle ne serait pas reconnue comme une réalité véritable; et si elle s’y soumettait, elle ne réussirait pas à le passer sans renoncer à la foi et à sa dimension révélée, ce qui entraînerait sa perte, par élimination de ce qui constitue fondement surnaturel.

Les penseurs des Lumières, proposèrent, par conséquent, un nouveau type de religion, dite religion naturelle ou déisme, qui avait les caractéristiques suivantes:

a) La religion se fonde sur la raison et non sur la foi, ni sur la révélation parce que celles-ci sont considérées comme mythe et superstition ;

b) le centre du déisme est le comportement, puisque, selon eux la religion doit être la gardienne et la garante de l’ordre moral individuel et collectif ;

c) la raison, par elle-même, peut découvrir Dieu en considérant l’ordre et la finalité de l’univers qui exige une intelligence capable d’en être l’ordonnatrice ;

d) cet Être Suprême a mis l’univers en ordre, mais ensuite il l’a abandonné à ses propres lois immanentes. Donc cet Être Suprême n’est pas une Providence, il n’intervient pas dans le déroulement de l’histoire;

e) la religion rationnelle n’a ni dogmes, ni rites, puisque la raison ne peut connaître la nature de cet Être Suprême.

Par conséquent, si l’on laisse de côté les attaques démesurées de certains philosophes, les penseurs éclairés, plutôt qu’éliminer la religion, essayent de la réformer pour l’adapter aux temps nouveaux; mais nous croyons que les dits penseurs plus que l’adapter, commencèrent en réalité à creuser sa tombe, sans se rendre compte qu’ils initiaient un processus de destruction de cette même religion qu’ils voulaient sauver. En effet, dépouiller la religion de son fondement révélé impliquait sa destruction, puisque l’on éliminait ce qui fait son essence.

A partir des deux dernières caractéristiques signalées, nous comprendrons que le déisme est une religion impersonnelle, où, même si l’on admet l’existence d’un Être Suprême, celui-ci reste inaccessible dans son ciel et totalement étranger à la vie des hommes sur terre. Une telle doctrine, ne conduira-t-elle pas, avec le temps, à l’oubli de cet être inaccessible sans lien avec les personnes ?

Voilà pourquoi nous pensons que cette doctrine ouvre le chemin à l’indifférence religieuse car elle coupe toute communication entre la divinité et les personnes. En outre, en défendant l’idée selon laquelle l’Être Suprême mit en marche ce monde, puis l’abandonna à ses propres lois, elle cautionne un monde organisé qui se dirige en l’absence totale de Dieu.

c-. La division du christianisme et les guerres de religion

Le christianisme s’était déjà divisé en deux avec l’orthodoxie, au XVIe siècle surgit une nouvelle au sein de la catholicité chrétienne, ce qui suppose une perte du caractère absolu de l’Église Catholique Romaine, qui finit par être considérée comme une simple religion parmi les autres.

Le conflit entre Rome et la Réforme protestante dépassa les limites religieuses et se transforma en un problème politique qui divisa l‘Europe en états des deux confessions qui se retrouvèrent engagés dans ce que nous appelons les Guerres de religion.

Ces guerres firent naître l’idée que la foi est un élément destructeur de convivialité et une source de division, de fanatisme et de violence. Lassés de tant de violence et poussés par un désir de paix, on proposa une religion fondée, non sur les dogmes et la foi, considérés comme des causes de division et de destruction, mais une religion universelle fondé sur la raison qui est commune à toutes les personnes et qui pourrait être embrassée par tout le genre humain.[12]

Ces deux facteurs conduisirent à l’indifférence dans le sens d’indifférentisme, comme nous l’avons déjà dit, indifférence selon laquelle il était sans importance d’appartenir à une religion positive ou à une autre, puisque la vraie religion c’était la religion naturelle de laquelle toutes les autres dériveraient. Par conséquent, il ne s’agit pas d’indifférence vis-à-vis du fait religieux, mais d’indifférence face à l’appartenance concrète à quelque confession religieuse.

Nous pouvons également trouver un autre facteur de relativisation des grandes religions révélées dans la découverte de nouvelles religions, grâce aux voyages dans des terres nouvelles. Ces nouvelles formes religieuses abaissèrent encore plus la prétention des grandes traditions religieuses à se présenter comme la religion absolue.

Déjà la Renaissance, en proposant un théisme universel, avait défendu l’idée que l’Infini ne pouvait pas être épuisé par aucune forme ni aucun nom concret. Par conséquent, toutes les formes religieuses, dans la mesure où elles étaient une expression partielle de l’Infini, pouvaient se comparer entre elles et devaient être respectées. L’important n’était pas d’appartenir à une expression religieuse concrète puisque toutes se situaient au même niveau; et si toutes étaient pareillement valables et contenaient une part de vérité, elles devaient être toutes respectées.

Donc, que ce soit en raison de cette conviction théorique, ou à cause de la lassitude et de l’épuisement provoqués par les guerres de religion, on voit poindre une certaine idée de la tolérance, manifestée par cette indifférence vis-à-vis de l’appartenance confessionnelle concrète.

d-. La lumière de la raison contre les ténèbres de la foi

Quelques penseurs éclairés considérèrent que la foi et la révélation étaient des éléments fantastiques et mythiques, car ils débordent les limites de la raison, portant à la superstition et au fanatisme. Si la foi et la révélation étaient des éléments irrationnels, ils devaient être combattus et éliminés pour être remplacés par la raison.

Les ténèbres de la religion révélée devaient être remplacées par la lumière éclatante de la raison. Voilà pourquoi Chaminade, pour décrire la situation de perte de la foi dans la France postrévolutionnaire, emploie dans beaucoup de ses écrits des expressions comme « la divine torche de la foi pâlit (…) Il semble que nous arrivions au moment prédit d’une défection générale et d’une apostasie en fait presque universelle. A Elle (Marie) est réservée la gloire de sauver la foi du naufrage dont elle est menacée »[13] et qu’il conçoit son travail missionnaire comme ayant pour but de  » raviver ou allumer à nouveau partout la torche divine de la foi. »[14] Suivant en cela l’encyclique Lumen Fidei, nous pourrions dire que Chaminade essaya de « récupérer le caractère lumineux propre de la foi » (LF 4).[15]

Chaminade n’hésite pas à affirmer que toute cette situation que nous avons décrite a son origine dans la philosophie des Lumières.[16]

L’indifférence religieuse aujourd’hui.

Concept

Comme nous l’avons déjà indiqué, le concept d‘indifférence religieuse’ a connu une évolution dont la conséquence a été que sa signification actuelle, même si elle est un peu différente, est liée, est une conséquence de ce que nous venons d’exprimer dans la partie précédente.[17]

Le phénomène de l’indifférence religieuse actuelle est un phénomène complexe qui se confond, dans la pratique, avec d’autres comme l’athéisme pratique ou la déchristianisation, même si, à un niveau théorique, on peut déterminer les limites et les caractéristiques propres à chacun.[18] Etant donné les limites de cet exposé nous ne pouvons pas nous arrêter à différencier ces phénomènes que nous prendrons comme s’ils étaient identiques, étant donné l’intime relation qui existe entre eux.

Aujourd’hui, nous nous trouvons devant une nouvelle réalité marquée non par la critique et l’opposition à la religion ou par la relativisation des confessions positives, mais par la perte de l’intérêt, l’importance et la signification du phénomène religieux, au niveau social comme au niveau personnel. L’indifférence religieuse « remet en question non seulement l’existence de Dieu ou la possibilité de le connaître, mais la consistance même du problème religieux (…)

Il y a plusieurs degrés, le plus important desquels est l’absence absolue d’inquiétude religieuse. L’indifférence religieuse consiste dans le fait que, pour une personne ou dans une atmosphère déterminée, on ne se pose même pas le problème du religieux. Dieu, qu’il existe ou n’existe pas, n’est pas une valeur, ni quelque chose d’important (…) L’indifférence religieuse est, avant tout, une attitude psychologique, une sensibilité, une mentalité, une expérience dans laquelle il n’y a pas de place pour la dimension religieuse. Mais cette attitude suppose une appréciation, au moins implicite, vécue: une théorie de l’indifférence religieuse dont la principale affirmation c’est que la question de Dieu ne présente pas d’intérêt ».[19]

Ce désintérêt total pour la question de Dieu fait que Girardi la qualifie de « la forme la plus radicale de l’athéisme »[20] et que d’autres auteurs, comme Remond lorsqu’il décrit le processus de sécularisation dans la société contemporaine, parlent de « sécularisation rampante », car ce n’est pas quelque chose de décidé, mais au contraire de a-thématique, d’où qu’il se transforme en un phénomène plus agressif encore, par lequel on montre clairement que la religion ne régule plus ni l’activité sociale, ni l’activité privée, qu’elle n’inspire ni les croyances collectives ni les valeurs communes puisqu’elle a disparu de l’horizon de la conscience aussi bien des gouvernants que des gouvernés[21].

Le Concile Vatican II déjà souligné cette situation en affirmant que « D’autres n’abordent même pas le problème de Dieu : ils paraissent étrangers à toute inquiétude religieuse et ne voient pas pourquoi ils se soucieraient encore de religion » (GS 19)

Ce qui distingue et caractérise l’indifférence religieuse actuelle c’est que nous ne nous trouvons pas face à une prise de position explicite des personnes ou des cultures sur la religion, mais face à une attitude spontanée d’incroyance pratique qui se manifeste par un désintérêt pratiquement total pour la chose religieuse, et se présente comme « le résultat d’une manière de vivre, dont l’origine se trouve dans les changements socio-économiques et culturels (…) le résultat d’une situation qui se diffuse en marge des options des individus et qui semble s’imposer comme un climat ou une atmosphère ‘irrespirable’ pour la vie religieuse (…) L’indifférence des personnes, qui, souvent, se trouvent comme immergées en elle sans avoir pratiquement pris la moindre décision personnelle (…). Jamais comme maintenant l’indifférence n’a été une question pratique ou, mieux encore, vécue, sans être le résultat d’une question théorique, ni le fruit d’une décision personnelle, mais un état de fait provoqué presque insensiblement par les conditions de vie imposées jusqu’à un certain point par l’évolution, presque jamais prise en charge consciemment, de la société et de la culture ».[22]

On ne discute donc pas de la question de savoir si Dieu existe ou non, cela n’a aucune importance, puisque, qu’il existe ou pas, ce n’est pas une valeur à prendre en considération dans la vie ordinaire. Voilà pourquoi « l’indifférence religieuse peut même affecter les attitudes des théistes. Il faut, en effet, admettre l’existence de Dieu (…) sans que cela n’ait d’implication dans la vie réelle. On accepte Dieu comme un être, mais non comme une valeur. Dieu explique le réel, mais cela ne change pas grand-chose dans la vie (…). Même en affirmant que Dieu existe, les gens vivent comme s’il n’existait pas. »[23]

Il y a déjà quelques années, Rahner parlait des « chrétiens anonymes », nous pouvons aujourd’hui parler « des athées anonymes », puisque cette situation peut se retrouver même chez des personnes qui se définissent elles-mêmes comme croyantes et religieuses.

Comme le disait le rapport final de l’assemblée plénière du Conseil Pontifical pour la Culture en 2004, nous nous trouvons face à un phénomène culturel, une espèce d’atmosphère qui englobe l’homme actuel et le conduit tout naturellement à cette situation. « L’indifférence et l’incroyance se développent dans des atmosphères imprégnées de sécularisme. Moins visible, cette atmosphère n’en est que plus dangereuse, car la culture dominante l’instille d’une manière subtile dans le subconscient des croyants (…). Elle devient un phénomène culturel, dans le sens où, le plus souvent, les personnes ne deviennent pas athées ou non croyantes par choix personnel et après un douloureux processus, mais tout simplement parce que cosi fan tutti, parce que c’est ce que tout le monde fait »[24].

Si saint Paul prêcha aux Athéniens, il prêcha le Dieu en qui nous avons la vie, le mouvement et l’être (Ac 17, 28); aujourd’hui nous pourrions que ce dans quoi nous vivons, nous nous mouvons et nous existons, c’est dans l’indifférence religieuse. Voilà pourquoi Martin Velasco va jusqu’à affirmer que l’indifférence « n’est pas pour eux (les jeunes) un point d’arrivée, après un processus lent et insensible d’éloignement du christianisme. C’est, plutôt, un point de départ auquel ils ont été condamnés pour être nés et avoir grandi dans un milieu d’où le christianisme a disparu comme référence religieuse ».[25]

Causes

a-. Les idées religieuses éclairées

Nous pensons que tout ce que nous avons exposé sur les causes de l’indifférence religieuse au temps de Chaminade peut s’appliquer aujourd’hui. Le processus, initié alors nous aurait conduit à la situation actuelle, comme nous allons le voir dans l’exposé suivant.

Comme nous l’avons déjà dit, si le déisme niait l’intervention de Dieu dans notre monde, lequel se régissait par lui-même de manière autonome grâce aux les lois naturelles, il est logique de penser que cela a conduit à un oubli de Dieu, oubli qui s’est accentué avec le temps.

Si au XVIIIe siècle on défendait déjà un indifférentisme face aux religions positives, depuis la seconde moitié du XXe siècle le pluralisme s’est accentué en rencontrant la situation cosmopolite de notre monde.[26] Il n’y a plus d’idéologie qui puisse se présenter comme monopolisant l’image du monde. Avec le pluralisme, les religions ne sont plus qu’une explication, parmi d’autres, du réel, en compétition avec d’autres explications. Devant cela, comment défendre la foi dans un monde pluraliste?

Comment affirmer sa propre prétention à la vérité? Comment la présenter face à d’autres propositions de vie? Le pluralisme engendre le doute puisque « étant donné le relativisme social dans lequel se trouve le croyant, son désir de certitude est paralysé par le milieu socioculturel. Au lieu de la certitude ce sont  l’indécision, la perplexité et le scepticisme qui croissent (…) La majorité restera installée dans une perplexité qui glisse lentement vers l’indifférentisme, même la nostalgie de l’Absolu demeure ».[27]

Crise du sens global

Quand nous parlons aujourd’hui d’indifférence religieuse, si nous voulons bien la comprendre, nous ne pouvons pas l’isoler de ce que nous pourrions nommer l’ »indifférence culturelle ». L’euphorie et l’optimisme du projet des Lumières, devenu idéologie du progrès, a laissé la place, au cours du XXe siècle à la crise des idéologies et à une méfiance dans la capacité de la raison instrumentale à donner à la vie de l’homme la plénitude et le bonheur, débouchant sur ce que l’on appelle la pensée faible ou les pensées de type pessimiste.

Nous pourrions parler d’une indifférence vitale et culturelle, comme nous le rappelle Caffarena quand il affirme que « l’indifférence la plus récente est liée, comme on n’aura pas manqué de le remarquer, à une crise des idéologies, (…) à un certain nihilisme diffus. Le ‘sens’ du projet collectif ne marche pas ».[28]

Comme ce même auteur dit ensuite que la crise globale de sens se manifeste dans le fait que ce manque de sens « n’est pas vécu comme une tragédie humaniste de l’absurde, mais comme un certain ‘désespoir tranquille' ».[29] L’indifférence religieuse ne serait que la manifestation dans l’espace religieux d’un état d’indifférence culturelle présente dans les autres cercles du réel. « L’indifférence religieuse est effet et symptôme d’une crise plus vaste de sens qui frappe de plein fouet les religions et les idéologies dans leur prétention à donner une explication ultime au sens de l’homme et au cours de l’histoire ».[30]

Une telle situation culturelle produit un climat d’insensibilité envers Dieu et envers les propositions ultimes de sens, puisque l’homme actuel, bousculé par les besoins et les urgences de chaque jour, est plus préoccupé de sa survie que des questions ultimes de sens. Comme nous le rappelle l’adage latin « primum vivere et deinde philosophari ».

c.- Sécularisation et laïcisation

A côté de la sécularisation que nous avons déjà décrite, il y a un processus de laïcisation qui influe sur l’organisation politique et sociale de notre monde, en entraînant la perte de l’importance sociale du fait religieux. Dans le processus de sécularisation, nous nous arrêterons sur le temps de la laïcisation[31], laquelle est définie comme l’élimination de toutes les références religieuses de l’organisation sociale[32], on peut la considérer un facteur favorisant l’indifférence religieuse puisque la société s’organise sans aucune référence religieuse, ce qui implique que le phénomène religieux est peu à peu oublié, puisqu’il n’apparaît pas dans la vie de tous les jours des personnes.

Cela se manifestera par des situations comme, par exemple, les tentatives de suppression des symboles religieux ou la réorganisation du temps et des fêtes.

Maintenant oui, nous nous trouvons face à une option politique qui peut être présentée comme un essai de neutralité entre l’État et la religion ou bien comme une élimination programmée de la religion, considérée comme ennemie de la société.

d-. La mentalité pragmatiste[33]

Dans la société contemporaine on est obsédé par le bien-être, ce qui s’accompagne d’une perte d’intérêt pour la transcendance et les interrogations sur la fin de la vie. Cette vie au jour le jour rend difficile l’ouverture de l’être humain à Dieu et aux fins dernières, tellement il est tourné vers la recherche de son bien-être immédiat. Une telle mentalité pragmatiste fait donc obstacle à une ouverture vers la transcendance.

e-. La mentalité instrumentale

En étroite relation avec ce que nous venons de dire, l’homme actuel, à cause du scientisme qui prédomine, vit dans la recherche de l’utile et du rentable. Le succès du développement scientifique et technique a fait que la rationalité des moyens l’a emporté sur la rationalité des finalités, transformant même les moyens en véritables fins; cela s’applique d’ailleurs à d’autres domaines que celui de la nature, comme la politique, la morale et le sens des choses.

Notre style de vie très technologique nous pousse à agir d’une manière pragmatique, en cherchant toujours à obtenir quelque chose de plus. Ainsi, les relations se mercantilisent et les personnes deviennent des choses, considérées seulement pour leur utilité.

En conséquence, on donne la première place et l’on recherche toujours ce qui nous rapporte un bénéfice immédiat, palpable ; dans ces conditions, la dimension religieuse, qui se situe dans le monde des finalités perd tout intérêt, puisqu’elle n’a à nous offrir aucun bien immédiat. Nous assistons donc à la perte du sens de la gratuité, qui est essentielle pour le phénomène religieux.

f-. La fracture entre le public et le privé

Notre société a divisé la vie de la personne en deux sphères: le privé et le public. Dans cette dernière on situe les droits et les devoirs du citoyen envers la société. Tandis que dans la sphère privée on mettrait tout ce qui se réfère à la conscience du sujet ; l’expérience religieuse serait ainsi de l’ordre du privé.

La dimension religieuse est reléguée dans la sphère individuelle au titre du droit de la personne, et devient une question privée. Les choix et les croyances religieuses sont des affaires personnelles qui ne doivent pas être mêlés à la sphère publique. Nous avons là un nouvel élément de la perte du rôle social de la religion.

Réponses à l’indifférence religieuse.

L’éducation.

Disons en premier lieu que, tout au long de cet exposé, nous avons indiqué qu’une des causes principales de l’état actuel d’indifférence religieuse se trouve dans les idées de la philosophie des Lumières.

Nous avons vu que son but était un but pratique: transformer la société et la vie de l’homme afin qu’il puisse être heureux. Et pour cela, il fallait créer une nouvelle forma mentis que l’on n’obtiendrait que si ses idées étaient assimilées par tout le monde. Les penseurs éclairés ne cherchèrent donc pas à élaborer une philosophie à destination d’une élite intellectuelle, mais de construire et de diffuser une philosophie qui puisse être comprise par tous. Or, l’un des moyens privilégiés pour la création d’une culture nouvelle et une pensée nouvelle, c’est, bien entendu, l’éducation.

En second lieu, nous avons indiqué que nous considérions que le noyau central de cette problématique n’était pas d’ordre religieux, mais anthropologique, puisque ce qui est en jeu c’est la personne humaine. Cela implique que pour répondre à cette situation il faille intervenir sur le développement d’une certaine conception de la personne à travers son éducation.

Troisièmement, quand nous avons décrit certains phénomènes qui conduisent à l’indifférence religieuse, nous avons défendu l’idée qu’elle ne peut être comprise de façon correcte que si on la place dans la situation culturelle.

Ces éléments nous amènent à présenter l’éducation comme un élément fondamental pour essayer de créer des conditions permettant de surmonter l’indifférence religieuse.

Déjà Chaminade, dans les lettres où il expliquait la mission de la Société qu’il avait fondée, et aussi dans ses Constitutions, défendait l’importance de l’éducation pour rallumer la torche de la foi et rechristianiser la France.[34] Cette intuition de Chaminade, dépouillée de ses nuances apologétiques et de condamnation de la culture de son époque, nous la considérons comme encore être valable aujourd’hui.

La Société de Marie possède une grande tradition pédagogique sur laquelle elle doit continuer à s’appuyer comme moyen d’éducation et d’évangélisation. Au-delà des débats autour de la neutralité supposée de l’éducation, dont nous pensons qu’elle est fausse, un travail pédagogique s’exerçant toujours à partir de principes et de présupposés, toute la structure éducative offre une énorme possibilité pour la création d’un sujet humain solide. A partir de l’esprit de tolérance et le respect de la liberté de la personne, la tradition marianiste, avec sa pédagogie, essaye de créer un style de personne humaine fondé sur un développement intégral dans toutes ses dimensions.

Sans aucun doute nous nous trouvons là devant des preambula fidei nécessaires à une option postérieure de foi. Si l’indifférence religieuse est manifestation et conséquence d’une indifférence culturelle, au lieu d’agit directement sur le phénomène religieux, il faudra agir sur la culture elle-même, ce qui rend nécessaire la tâche éducative.

Si toute option éducative doit rechercher le développement intégral de la personne et la formation de sujets solides, comme école catholique, et dans le respect de la liberté personnelle, on ne peut renoncer à éduquer un modèle de personne chrétien et, j’oserais même dire, marianiste. Y renoncer ce serait renoncer à l’être même de l’éducation, à l’être de l’éducation chrétienne et marianiste.

Élargissement de la rationalité

Les Lumières imposèrent un type de rationalité comme étant la Rationalité tout court. Elles ont donc opéré un réductionnisme anthropologique, gnoséologique et ontologique. Elles réduisirent la raison humaine à la rationalité théorico-instrumentale; elles réduisirent les possibilités de la connaissance, en imposant une seule méthode valable d’étude; elles réduisirent le réel, car ne serait considéré comme réel que ce qui pourrait être appréhendé par ce type de raison.

Comme nous l’avons vu, Chaminade dénonça l’absolutisation de la raison éclairée, la considérant comme erronée puisqu’elle n’admettait pas ses limites, alors qu’elle était blessée par le péché et qu’elle n’était plus soutenue ni guidée par la foi. Le développement postérieur de la pensée philosophique a aussi effectué une dure critique de cette absolutisation de la raison éclairée.

La philosophie a souligné les limites d’un modèle de raison qui s’érige en la Raison avec un grand R et oublie les autres dimensions de la personne humaine. Bien que pour d’autres raisons et dans les conditions propres à son temps et à sa formation, Chaminade toucha juste dans sa critique de cette prétention hégémonique de la raison des Lumières, même si aujourd’hui on ne peut pas affirmer qu’un athée ou une pensée qui ne tient pas compte de pousse nécessairement à l’immoralité, comme on pourrait déduire de la critique faite par Chaminade et qui se reflète également dans la conception morale de la religion éclairée qui poussa Locke à affirmer qu’on ne pouvait pas tolérer l’athéisme.[35]

Ce réductionnisme fit rejeter toute la dimension religieuse fondée sur le surnaturel, considérée comme une superstition. Mais que la foi aille au-delà de cette rationalité et la déborde, ne doit pas porter à la considérer comme irrationnelle. Nous croyons qu’on pourrait dire que la foi n’est pas irrationnelle mais trans-rationnelle, c’est-à-dire qu’elle n’est pas contraire à la raison, mais qu’elle la traverse et va au-delà.

Voilà pourquoi nous avons dit que nous ne nous trouvions pas face à un problème exclusivement religieux, mais anthropologique et gnoséologique. Dans cette perspective, pour essayer de dépasser l’indifférence religieuse, il faut aller au-delà du purement religieux et nous ouvrir à une réflexion anthropologique.

Nous pensons que l’on doit réaliser un effort intellectuel afin d’élargir la compréhension de la rationalité en y insérant les autres dimensions de la personne humaine jusqu’à maintenant marginalisées. Aujourd’hui on commence à parler d’intelligence émotionnelle ou d’intelligence sociale. Il faudrait travailler aussi à la défense d’une intelligence religieuse en tant qu’une des dimensions de la personne humaine.

Cette tentative de recherche d’une nouvelle rationalité pourrait entrer dans le cadre d’un dialogue entre foi et culture qui serait aussi très intéressant. Mais sans volonté de dialogue sincère, il sera impossible de dépasser cette situation et on restera dans un climat de mutuelle incompréhension.

Susciter de l’intérêt

Si l’indifférence religieuse actuelle se présente comme une perte d’intérêt pour le phénomène religieux, un moyen de la surmonter serait peut-être d’essayer de réveiller l’intérêt pour la religion.

Sans aucun doute, l’indifférence religieuse représente un grand défi puisqu’elle suppose d’obtenir que quelqu’un s’intéresse à quelque chose qui ne l’intéresse pas. Il ne s’agit d’arriver à ce que la personne accepte la foi, mais que, du moins, Dieu devienne un problème puisque « si se trouver dans l’indifférence religieuse signifie ne même pas voir Dieu comme un problème, arriver à le voir comme un problème non résolu, est déjà un progrès très positif.[36]

Comme le signale Caffarena ce serait déjà un grand pas en avant que l’indifférent devienne agnostique. Cette ouverture au sens pourrait s’effectuer d’une manière indirecte à travers des expériences qui peuvent constituer pour l’homme, d’authentiques approches du mystère, comme par exemple le sens esthétique, la dimension éthique ou les relations interpersonnelles.[37]

A partir de ces expériences on pourrait entrer en dialogue avec les indifférents. Ce serait une pré-évangélisation qui pourrait créer une ambiance favorable à l’écoute.

La nouvelle évangélisation

En lien étroit avec le paragraphe antérieur, il faut signaler combien dans la majorité des sociétés occidentales une nouvelle évangélisation serait nécessaire; non pas dans le sens de trouver de nouvelles méthodes –bien sûr nécessaires- mais celui de conduire à nouveau une évangélisation en tenant compte que nous nous trouverions face à des sociétés déchristianisées et qui, donc, ont assimilé toute une série d’éléments préalables et des préjugés envers la religion elle-même.

Dans la pastorale et dans l’éducation religieuse on constate souvent qu’aujourd’hui, en matière religieuse, nous ne pouvons jamais supposer connu quoi que ce soit, et en bien des occasions il faut commencer par démonter toute une série de préjugés qui rendent difficile la présentation du message évangélique, pour pouvoir ensuite le présenter en partant de zéro.

Vie intérieure, vie de foi et témoignage de vie.

L’indifférence religieuse fait que le croyant se retrouve, non pas face à une atmosphère d’hostilité directe, mais face à un horizon culturel fermé à la transcendance, ce qui rend plus difficile le fait de vivre sa propre foi car ce n’est pas une foi persécutée mais « une foi affrontée à l’aridité d’un terrain peu apte pour comprendre ses points de vue et son choix »[38].

Devant une telle situation, le croyant doit avoir une forte vie intérieure et de foi pour être capable de la vivre ‘en pleine intempérie’, ce qui est bien plus difficile que s’il était persécuté. La persécution ou la négation peuvent fortifier jusqu’au martyre et conduire à chercher les réponses explicites possibles, mais l’indifférence peut porter au découragement et même à l’abandon par usure. Mais le fait religieux pourra à nouveau avoir une signification sociale si les croyants ne gardent pas pour eux-mêmes cette vie intérieure de foi, mais s’ils en témoignent publiquement dans la société.

Dans le respect et la tolérance, propres aux sociétés démocratiques et pluralistes, les croyants doivent présenter leur foi comme une option valide parmi les différentes propositions sociales. Loin de se cacher, la foi doit être visible et se montrer comme un facteur de plénitude et de développement social. Dans ce sens une grande lucidité est nécessaire pour trouver la manière adéquate de manifester la foi dans un langage actuel et qui sache d’insérer dans la vie quotidienne des personnes.

Le témoignage de vie, au sein de la société, en assumant pleinement ses responsabilités de citoyen et en collaborant à la construction d’un monde meilleur, peut aider à susciter de l’intérêt envers la religion et qu’elle soit considérée comme une proposition de sens valable.

Il s’agirait de témoigner de Dieu dans l’histoire concrète et, surtout, là où la vie humaine est le plus menacée par la pauvreté, la violence, la douleur et la maladie. Ce témoignage de vie ne doit pas se réduire à un simple travail philanthropique, mais doit bien être le reflet de la foi qui l’inspire.

Vivre sa foi en communauté

Si le déisme refusa le culte et la relation religieuse, si la société contemporaine a relégué la religion dans domaine du privé, nous devons tenir compte que le catholicisme ne peut pas renoncer à sa dimension ecclésiale et communautaire et à sa dimension sociale, qui lui sont constitutives. Face à cette privatisation de la religion, Chaminade fonda la Congrégation de Bordeaux pour que les croyants puissent vivre en commun leur foi et témoigner de leur foi au sein de la société déchristianisée où ils étaient appelés à vivre.

Aujourd’hui cette proposition et toujours valable. En plus de mettre en relief le caractère social et public de la religion, la communauté offre un soutien indéniable pour pouvoir vivre la foi dans une ambiance d’indifférence.

Dans cette communauté, on pourrait cultiver la vie intérieure et le témoignage dont nous avons parlé plus haut. Ces communautés ne seraient pas des groupes fermés pour un soutien de l’affect et du religieux, mais des communautés ouvertes qui, en cultivant leur spiritualité, s’ouvrent au monde pour s’y rendre présents.

CONCLUSION

Après tout ce que nous avons exposé, nous pouvons observer combien le concept d’indifférence religieuse a évolué, au fil du temps; de l’indifférence envers l’appartenance effective à une confession religieuse déterminée jusqu’à un climat culturel de désintérêt pour le phénomène religieux.

Nous avons essayé de situer le phénomène de l’indifférence religieuse dans son contexte culturel et social, car nous pensons que c’est en partant de là qu’on le comprend le mieux. Voilà pourquoi, à l’époque de Chaminade nous l’avons inséré dans la pensée des Lumières et dans son projet de transformation de la société et de la culture; et á l’époque actuelle nous l’avons située dans ce que l’on appelle la crise des idéologies. Même si, aujourd’hui, l’indifférence religieuse se manifeste comme une ambiance de désintérêt spontané.

Nous devons tenir compte du fait que cette situation n’a pas surgi par elle-même, mais qu’elle est le fruit d’une pensée et d’une idéologie, qui, ensuite, s’est incarné dans des options politiques, culturelles et sociales qui, le temps passant, se sont cristallisées de telle manière dans notre culture qu’elles semblent être devenues indépendantes vis-à-vis de leurs propres causes, en nous laissant l’impression qu’elles sont quelque chose de naturel, comme s’il s’agissant d’une atmosphère qui nous entoure.

Si nous reconnaissons l’indifférence religieuse comme une situation de fait que les personnes trouvent comme ça et qui ne semble avoir aucune cause définie, nous ne pourrons jamais apporter une réponse adéquate. D’ailleurs cela supposerait que nous nous trouvons face à un phénomène sans cause, dont nous ignorons pourquoi il est apparu.

Au contraire, nous pensons que cette situation est le résultat d’une pensée, que nous avons située à l’époque des Lumières, même si nous n’ignorons pas que certaines idées antérieures la favorisaient, résultat également des options que nous venons d’énoncer et qui, sans doute ont peu à peu généré un type de structure sociale et culturelle bien déterminée.

Voilà pourquoi nous avons essayé de considérer l’indifférence religieuse non seulement comme un problème religieux mais aussi comme un phénomène dont le noyau central est d’ordre culturel et anthropologique: une manière différente de comprendre l’être humain et le réel. Certaines des propositions que nous avons énumérées plus haut sont davantage d’ordre culturel que religieux. Mais si nous en restons aux réponses qui visent seulement les manifestations religieuses, nous pensons qu’on n’arrivera pas au noyau intime du problème.

Il y a encore une autre conviction de fond: la pensée des Lumières et son évolution postérieure ont laissé la religion dans une situation très compliquée, mais nous pensons que c’était un processus très nécessaire et que la religion devra trouver la manière de se resituer dans ce nouvel environnement culturel, qui a aussi besoin d’être repensé et resitué.

Pour cela, il devra chercher les réponses dans sa propre tradition puisque nous considérons que les Lumières et la sécularisation sont « filles » du christianisme. Des éléments comme la dignité de l’homme, l’anthropocentrisme, l’humanisme, l’indépendance et la bonté des réalités créées, la connaissance et la transformation du réel, pour ne citer que quelques aspects centraux de la pensée moderne… sont des éléments qui ont été proclamés par la tradition judéo-chrétienne, mais les Lumières les ont portés jusqu’à un point extrême.

On pourrait les comparer à des adolescents rebellés contre leurs parents mais qui, après les conflits de cette étape difficile, devront en revenir à la convivialité, en partant chacun de sa propre identité et indépendance mais sans renoncer à son être et à ses racines. On ne pourra pas retourner à la situation passée, et essayer de retourner à des pratiques et à des formules antérieures n’est pas la solution. La nostalgie du passé n’aidera pas à situer la religion en accord avec les exigences actuelles.

Au contraire, on devra avoir la lucidité et le courage de rechercher de nouvelles propositions sans renoncer à ce que nous sommes.[39].

La tâche n’est pas facile, mais elle n’est pas impossible et elle doit être envisagée avec la conviction que le christianisme, et concrètement le charisme marianiste, est toujours valable et reste une proposition de sens et de bonheur à proposer à l’homme moderne, mais également que notre culture a beaucoup à    apporter au vécu religieux.

Nous voulons terminer sur cette image du philosophe José Antonio Marina:

C’est très difficile de parler de religion. C’est comme parler des vitraux d’une cathédrale. Pour celui qui se trouve dedans, les vitraux brillent comme le soleil. Mais celui qui se trouve dehors ne voit que le gris monotone et plombé, triste comme cette journée. Tous deux se diront à grands cris ce qu’ils voient, mais sans jamais se comprendre. »[40]

Il se peut que, jusqu’à présent, ceux qui se trouvent dans la cathédrale et ceux qui sont à l’extérieur se soient limités à crier sans se comprendre. Cette situation dans laquelle chacun s’accroche à sa position n’a été bonne pour personne. C’est le moment où il faut que ceux qui sont dans la cathédrale sortent dehors, et que ceux qui sont dehors y entrent et ainsi fassent un effort pour comprendre l’autre en partant de sa position à lui.

Nous ne défendons pas une acceptation non critique du point de vue de l’autre, mais un effort pour comprendre l’autre dans sa propre identité.

Ce dialogue ne doit pas être seulement intellectuel, mais comme cela se dégage de la comparaison proposée, il exige un engagement existentiel de sortir de soi-même pour se mettre à la place de l’autre.

Et non pas pour retourner ensuite chacun à sa position initiale, mais pour essayer de créer un va-et-vient continuel qui fera découvrir la couleur qui existe à l’intérieur de la cathédrale, mais sans oublier que cela n’est possible que grâce à la lumière qui vient de l’extérieur.

NOTES

[1] Lamennais, cité par WEILER «sur les causes de l’indifférence religieuse» in Concilium 185 (1983) p.182.
[2] Comme le dit Glucksmann, aujourd’hui “il n’y a pas de guerre entre croire et savoir. La perte d’énergies est semblable des deux côtés (…) Il ne s’agit pas de remplacer Dieu, ce qui arrive c’est qu’il n’y a plus de place pour lui (…) Voilà le panorama: Dieu est mort ou du moins il commence à battre en retraite; il semble abandonner la scène sans que personne ne prenne la peine de le rejeter» Dans «La troisième mort de Dieu» En espagnol Ed. Cairós, Barcelone 2001. pp. 23 et 31.
[3] RUEDA, Guillermo José Chaminade y el pensamiento moderno. Crítica a la indiferencia religiosa SRM Madrid 2002.
[4] GIBELLINI: “Au-delà de l‘athéisme. Rapport du secrétariat pour les non croyants sur l’indifférence religieuse »   Concilium 185 (1983) p. 283?
[5] Il faut tenir compte du dynamisme anthropologique, défendu par Chaminade et d’origine thomiste, connaître – aimer – servir, d’après lequel la foi une fois confessée doit au cœur pour être aimée, puis vécue, ce qui implique qu’une véritable pratique de la religion ne peut naître que d’une bonne instruction religieuse et, donc qu’une doctrine erronée ne peut conduire qu’à une action inappropriée. Pour approfondir ce principe: cf. GASCON Proposer et défendre la foi dans l’enseignement de G.J. Chaminade. SPM Madrid – 1998   pp 245-259
[6] CHAMINADE: “Oubli de Dieu. Athéisme pratique” – Pardo (traduction) – Notes d’instruction. Ed. SM – Madrid 1972, v.1 , 26
[7] Adriaen de Lezay-Mamésia, cité par Crosti: Religion ou politique? Conservation et démocratie. Lamennais. – Marco editore, 2009, p. 81. Chaminade décrivait également cette situation quand il affirmait que « tous les jours la raison pénétrait en France dans les commerces et dans les palais. » (Lettres IV, 374)
[8] Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Article Encyclopédie, cité par Flores «La Philosophie dans l’Europe des Lumières ». Ed. Síntesis. Madrid. 1998 page 20
[9] Kant. “Réponse à la question: “Qu’est-ce que les Lumières?” Tecnos Madrid 1994 , p.17
[10] FERRONE. Église catholique et modernité. El Il mulino Bologna – 2004, p. 19.
[11] Cf. Gusdorf La consciente chrétienne au siècle des lumières. ED VD 1977 p 11 où il explique « qu’il ne s’agit pas du tout d’une contestation radicale de la religion, mais bien plutôt un néo-christianisme, désireux d’intégrer les nouvelles certitudes de la connaissance scientifique et philosophique. ».
[12] Cf. Martin. “Le mal-être religieux dans la culture”: Ed Paulinas – Madrid – 1993. pp. 86-87
[13] Cf. Chaminade “Lettre aux prédicateurs de retraites” (24 août 1839) Lettres Havaux – T. V p.73.
[14] Cf. Chaminade “Lettre au Pape Grégoire XVI» (16 septembre 1838) Lettres T. IV p.374
[15] Puisque nous avons analysé l’encyclique Lumen Fidei dans un autre exposé nous n’allons pas nous y arrêter ; mais nous considérons que beaucoup des points dont nous parlons sont analysés dans l’Encyclique, comme par exemple le fait de considérer la foi comme une illusion (2), la vision intégrale de la personne pour rendre possible l’acte de foi (26), la dimension communautaire de la foi (39), la dimension publique et l’engagement politique de la foi (51 et 54).
[16] Cf. Chaminade : “Lettre au chanoine Valentini” (31 octobre 1839) dans Lettres T. V p. 125. Là nous pouvons lire: « Les efforts combinés du philosophisme moderne, de l’indifférence religieuse qui en découle ».
[17] Après Caffarena nous pouvons dire que “le mot n’est pas nouveau, et la réalité qu’il invoque non plus. Mais ses nuances ont changé et aujourd’hui elles sont certainement différentes et plus radicales ». dans « Racines culturelles de l’incroyance », in GOMEZ-MARDONES: « Athéisme moderne ou incroyance religieuse » Université Ibéro-américaine, Mexico, 1999, p 75.
[18] Cf. GONZALEZ CARVAJAL: « L’indifférence religieuse dans la société postmoderne » dans VV.AA 250 ans après: « l’homme qui ne meurt pas » SPM Madrid 2011 pp 9-10.
[19] GIRARDI. “Réflexions sur l’indifférence religieuse” dans Concilium 23 (1967), pp 440-442
[20] Ibid. P 440.
[21] Cf. REMOND “La sécularisation. Religion et société dans l’Europe contemporaine » Laterza – Bari, 1998, pp. 280-282
[22] MARTIN Op. Cit. Pp. 88-89.
[23] MARTIN: op. Cit.   Pp. 442-443.
[24] CONSEIL PONTIFICAL DE LA CULTURE: “Où se trouve ton Dieu? La foi chrétienne face à l’incroyance religieuse. Document final de l’Assemblée plénière. – 2004
[25] MARTIN. Op. Cit. Pp. 91-92
[26] GÓMEZ. Op. Cit. P. 76
[27] MARDONES Op. Cit p. 118
[28] Ibid. P. 78.
[29] Ibid. P. 78.
[30] GEDRÉ “Destin de la foi chrétienne dans un monde d’indifférence », in Concilium 185 (1983) p. 243
[31] Comme nous ne pouvons pas le faire ici, pour une étude plus détaillée des différentes étapes de la sécularisation, on peut consulter le travail déjà cité de Remond, pp 175 et ss.
[32] Cf, REMOND, Op. Cit. P. 199.
[33] Nous empruntons l’énoncé des causes suivantes à l’étude de GOMEZ-MARDONES, déjà citée.
[34] Cf. RUEDA Op. Cit. Pp. 260-265.
[35] Cf. LOCKE: “Lettre sur la tolérance ». Tecnos – Madrid – 1998, p. 57 où il dit «Ne doivent pas absolument être
tolérés ceux qui nient l’existence de Dieu (…) Mettre à part Dieu, même seulement en pensée, dissout tout».
[36] GÓMEZ. Op. Cit p 92.
[37] Cf MARTIN Op. Cit pp. 98-99
[38] MARDONES: Op. Cit p. 143.
[39] MARINA- Chroniques de l’ultra-modernité – Anagrama – Barcelona – 2000. p.189

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