Guillaume-Joseph Chaminade missionnaire apostolique

Sa nomination (28 mars 1801)

A peine rentré en France depuis quelques mois, le P. Chaminade, par rescrit du 28 mars 1801, est nommé Missionnaire apostolique. Lui-même avait demandé au Saint-Siège cette no­mination. Mgr de la Tour du Pin, archevêque d’Auch, avait appuyé cette demande. A cette époque en effet et jusqu’à la signature du Concordat (1802), le P. Chaminade, tout en résidant habituellement à Bordeaux, était aussi Administrateur du diocèse de Bazas qui dépendait alors de l’archidiocèse d’Auch.

Nommé par la Propaganda Fide

Il faut remarquer que la nomination de Missionnaire apostolique de notre fondateur est faite par la Congrégation romaine de la Propaganda Fide, aujourd’hui «Congrégation pour l’Evangélisation des peuples». Celle-ci fut fondée en 1622 afin d’assurer, à travers le monde et de façon coordonnée, la mise en œuvre du message missionnaire du Christ à son Eglise : Allez, de toutes les nations faites des disciples, annoncez l’Evangile à toute créature.

Pour réaliser ce but, la Congrégation romaine avait très tôt mis sur pied trois sortes de Missionnaires à qui elle donnait des «Lettres de Missionnaire apostolique» :

  1. Les Missionnaires apostoliques envoyés en terre non chrétienne pour y implanter l’Eglise. Telles sont les missions étrangères. Ce n’est pas ce que le P. Chaminade avait demandé.
  2. Les Missionnaires apostoliques honoraires. Titre donné à des prêtres qui avaient déjà exercé une activité extra-paroissiale, surtout de prédication. Le document qui accompagnait cette no­mination, précisait certains privilèges donnés à ces prêtres : celui, par exemple, de l’autel privi­légié, celui de bénir et d’indulgencier les chapelets dits de sainte-Brigitte, le tout avec l’assentiment de l’Ordinaire.
  3. Les Missionnaires apostoliques envoyés en territoires hérétiques d’Italie et de France. En effet, à la fin du XVIIIe siècle, la Propaganda Fide se mit à envoyer dans divers pays européens d’authentiques Missionnaires. La lettre qui accompagnait une telle nomination, leur donnait des privilèges analogues à ceux concédés aux missionnaires envoyés en terres infi­dèles. Mais on comprend aisément qu’un tel Missionnaire apostolique, envoyé dans un pays où la hiérarchie catholique était établie, ne pouvait remplir sa charge qu’en accord avec l’Ordinaire du lieu. Telle est la nomination demandée, et obtenue par le P. Chaminade en mars 1801.

Répondre à quelques questions

Pour bien saisir la signification de ce troisième statut de Missionnaire apostolique dans la vie de notre Fondateur, je me suis posé quelques questions dont les réponses peuvent éclairer, me semble-t-il, notre recherche :

¦ Comment G.-Joseph Chaminade en est-il arrivé à prendre cette décision, à formuler pareille demande au Saint-Siège ? Comment la Providence l’y a-t-elle préparé ?

¦ Quel est le sens ecclésial de cette nomination qu’il a lui-même demandée au Saint-Siège ?

¦ En quelles fondations d’Eglise, durant les 49 dernières années de sa vie, a-t-il incarné cette charge de Missionnaire apostolique ?

¦ Quels furent, et sont encore aujourd’hui, les dynamismes missionnaires qui ont inspiré ces fondations successives et quelles furent leurs expressions préférées ?

¦ Qu’en est-il, plus globalement, de la mission marianiste aujourd’hui ?

Les Préparations providentielles

La démarche du prêtre G.-Joseph Chaminade après son retour d’exil, en novembre 1800, ne fut pas un acte fortuit. Une rapide relecture des 40 premières années de sa vie nous en ré­vèle les racines profondes.

Au Collège-Séminaire de Mussidan

Outre son éducation chrétienne en famille, il faut prendre en compte le temps que les deux frères Chaminade, Louis et G.-Joseph, ont passé au Collège-Séminaire de Mussidan, d’abord comme élèves, puis comme membres de la Congrégation des Prêtres de saint-Charles (1771-1791). Celle-ci assurait la direction de cet établissement d’éducation chrétienne connu, vers la fin du XVII° siècle, dans tout le sud-ouest de la France.

Sous la direction de leur frère aîné Jean-Baptiste, ancien Jésuite, nos deux jeunes firent de réels progrès dans leurs études et surtout en vie spirituelle. A l’âge de 14 ans, le jeune G.-Jo­seph, pour ne parler que de lui, choisit librement de vivre selon les conseils évangé­liques, puis de se consacrer lui-même entièrement et pour toujours au Seigneur par les trois voeux de chas­teté, de pauvreté et d’obéissance, dans l’esprit de la Congrégation des Prêtres de saint-Charles et sous sa règle.

Toute sa vie, le P. Chaminade a considéré cet engagement comme définitif et, au tempo­rel, il n’a jamais fait partie de la Société de Marie [1]. Donc dès son adolescence, le jeune Chami­nade s’est engagé pour la vie envers notre Seigneur Jésus Christ. Le cœur du futur Mission­naire et fondateur était sur la bonne voie. Les ap­pels de Dieu se préciseront, il est bien disposé envers Dieu et saura les accueillir, les vivre et les faire vivre. Le Missionnaire n’est-il pas avant tout un homme de Dieu, témoin en ce monde de l’amour infini que le Seigneur porte à tout être ?

Progressivement G.-Joseph et son frère Louis, de 2 ans plus âgé, deviennent membres de la « Communauté des Missionnaires de Mussidan » comme on appelait aussi les prêtres qui tenaient ce Collège-Séminaire [2]. Outre saint Charles Borromée leur saint Patron, saint Vincent de Paul y était en particulière vénération. Lui, en vrai missionnaire, avait fondé, en 1625, les prêtres de la mission, puis, en 1642, des Séminaires pour former des prêtres, Séminaires appelés eux aussi des «missions permanentes».

En effet, les missionnaires prédicateurs de l’Evangile se sont vite rendu compte qu’il ne suffisait pas de convertir, mais qu’il fallait une présence missionnaire permanente. Ainsi saint François Xavier, aux Indes, comprit que la mission itinérante devait se doubler d’un collège pour l’éducation chrétienne des jeunes [3]. Même opinion chez Condren, Sulpicien, qui, dans sa dernière leçon, dit à ses Séminaristes :

Le fruit des missions, quoique excellent, n’est que passager et se perd, s’il n’y a de bons ecclé­siastiques pour le conserver ; il conclut qu’il fallait nécessairement travailler à en former dans l’Eglise, ce qui ne peut se faire qu’en des Séminaires [4].

Les éducateurs du Collège-Séminaire de Mussidan, animés de cette perspective, pou­vaient donc se considérer comme d’authentiques Missionnaires. En pareil environnement a germé et s’est développé, en G.-Joseph Chaminade, le regard missionnaire sur tout ser­vice d’Eglise par­ticulièrement sur celui des maisons d’éducation chrétienne qu’il apprit à regarder comme des missions permanentes.

A Bordeaux, le Missionnaire clandestin

Fin 1791, l’abbé Chaminade vint se fixer à Bordeaux et la Terreur l’obligeait à se cacher et à risquer sa vie de prêtre. Son action devint alors celle d’un missionnaire clandestin, car les structures ecclésiastiques avaient été pourvues par les prêtres ayant prêté le serment à la «Constitution civile du clergé». Devant des lois iniques qui voulaient pertinemment la déchris­tianisation de la France, des évêques réagirent, tel celui de Luçon, en Vendée, qui, dans une lettre, commentait la loi du 28 septembre 1795 :

Le bien de la religion exige que nous nous conduisions en tout comme les missionnaires qui travaillent dans les pays infidèles, dans les Etats-Unis de l’Amérique, et dans l’Angleterre, ne prenant aucune part aux affaires temporelles, respectant l’autorité qui domine et ne nous oc­cupant qu’à établir le règne de Jésus Christ qui n’est pas de ce monde [5].

De telles directives missionnaires, l’abbé Chaminade les a faites siennes. Durant toute sa vie de Missionnaire apostolique il s’est efforcé de respecter l’autorité établie et de s’adonner de toutes ses forces à la seule évangélisation, par lui-même et par les siens.

En exil à Saragosse

Fin septembre 1797, G.-J. Chaminade doit prendre la route de l’exil. Il se dirige vers Sa­ragosse en Espagne où il pouvait se joindre à un important groupe de prêtres exilés et où son frère Louis viendra le rejoindre. Vrai passage au désert durant trois ans ! C’est aussi le temps de bien des grâces qui vont structurer progressivement, dans le coeur du futur Fondateur de la famille Marianiste, deux axes spirituels dynamiques : Marie et la Mission.

Marie d’abord. Depuis son enfance, G.-Joseph aimait et vénérait la Vierge Marie [6]. A Mussidan, il s’était engagé à promouvoir particulièrement le culte de l’Immaculée. A Saragosse, prend forme en lui la foi en la mission maternelle de Marie dans l’Eglise et l’appel à se donner à elle, à faire alliance avec elle. Il recréera, dès son retour en France, la Congrégation mariale pour offrir à Marie une famille et, par elle, à l’Eglise un dynamisme marial nouveau.

La Mission. Son sens inné de l’Eglise dont le Pape est le Chef et la colonne de vérité, les grâces reçues près de Notre-Dame del Pilar et la situation catastrophique de la foi chré­tienne en France, font mûrir dans le cœur de G.-Joseph Chaminade le désir d’être, lui aussi, un de ces Missionnaires dont on parlait dans les conférences entre prêtres exilés. Il était aidé en ce sens par le livre de Jean-Noël Coste, Manuel des Missionnaires [7]. Ce prêtre de Tulle avait sys­tématisé et présenté avec beaucoup d’équilibre les visions d’avenir des prêtres exilés. Les postes ecclésiastiques, en effet, étant tous pourvus en France, les prêtres, à leur retour d’exil, auraient donc tous un statut de «missionnaires». Ils seraient tous comme des hors-cadres, sans statut ecclé­siastique de curé ou de vicaire reconnus, eux, par l’autorité civile. A ces nouveaux mission­naires il fallait une reconnaissance ecclésiale. Ainsi a pris forme, durant son exil, la démarche que fit le prêtre G.-Joseph Chaminade, en vue de sa nouvelle insertion apostolique dans la France post-révolutionnaire.

Ce difficile temps d’exil fut donc pour notre fondateur celui de l’enfantement d’un homme nouveau, prophétique, celui d’un prêtre charismatique pour l’Eglise à venir. Il est im­patient de rentrer à Bordeaux. Nous n’avons encore rien fait. Il est question de commencer tout de bon, et de faire quelque chose pour la gloire de Jésus-Christ, notre bon Maître, écrit-il, en août 1800, à Mlle Marie-Thérèse de Lamourous [8]. Remarquons le double constat : nous n’avons en­core rien fait, et la volonté de commencer tout de bon une sorte de nouvelle vie. On pourrait croire, à la lecture de cette lettre, que G.-J. Chaminade vient d’achever ses années de forma­tion. Il a pourtant 39 ans lorsqu’il rentre, en novembre 1800, à Bordeaux.

Sens ecclésial de sa qualité de missionnaire apostolique

Le P. Chaminade ne va pas à l’aventure mais immédiatement il se met à l’oeuvre. Il a l’intime conviction d’être appelé à travailler à la rénovation de la foi chrétienne au nom même de Marie. Son apos­tolat d’avant l’exil l’avait mis en relation avec des chrétiens et des chré­tiennes ancrés dans leur foi. Avec eux il va mettre en oeuvre les appels de Saragosse. Les deux jeunes gens qui viennent à sa messe du 8 décembre 1800, lui sont connus ainsi que ceux qu’il leur demande d’amener pour une prochaine rencontre. Chaminade veut regrouper ceux que les événements avaient isolés, dispersés. Unis, ils feront beaucoup plus de bien.

A contrecœur et pour peu de temps, il vient aussi d’accepter la charge d’Administrateur du diocèse de Bazas (1800-1802). Ses motifs ? Il les donne brièvement dans une lettre : L’amour que Dieu m’a inspiré pour son Eglise lui a fait accepter cette charge ecclésiastique. Ce­pendant son cœur est ailleurs. Il a devant ses yeux l’état de la ville de Bordeaux et le délaisse­ment surtout de la jeunesse [9].

Devenir Missionnaire apostolique

Dans ce contexte de reprise d’activités il pose un jalon de première importance, rappelé tout au début de cet exposé. Il vient de demander au Saint-Siège, et il obtient, le 28 mars 1801, de la Congrégation de la Propaganda fide, la qualité et la situation ecclésiale de Missionnaire apostolique. C’était bien le souci missionnaire qui lui fit entreprendre cette démarche. En 1830, dans une lettre, le P. Chaminade confie au Comte de Noailles :

Dieu daigna m’inspirer, il y a de longues années, le désir de travailler au soutien de la religion dans notre malheureuse patrie. Pour le faire plus efficacement, je demandai des Lettres de Missionnaire apostolique ; je les obtins [10].

Et au Pape Grégoire XVI lui-même, le P. Chaminade rappelle que :

pour opposer une digue puissante au torrent du mal, le Ciel m’inspira, au commencement de ce siècle, de solliciter du Saint-Siège les Lettres patentes de Missionnaire apostolique afin de raviver ou de rallumer partout le divin flambeau de la foi [11].

Il est donc clair que se faire nommer Missionnaire apostolique fut pour le P. Chaminade le moyen ecclésial de remplir au mieux sa mission au service de la foi, telle que l’Esprit la lui avait inspirée dès sa jeunesse, qui s’est structurée progressivement et a mûri à la fin de son exil.

Sous l’autorité des évêques

L’homme d’Eglise que fut toute sa vie notre Fondateur, ne pouvait rien entreprendre qui ne soit approuvé et encouragé par les autorités de l’Eglise, que ce soit son Archevêque ou le Pape. Pour obtenir sa nomination de Missionnaire apostolique, le P. Chaminade s’est donc adressé à la Congrégation de la Propaganda Fide. Pourquoi cette démarche ?

Nous avons vu plus haut que dès après sa création, en 1622, la Congrégation de la Propa­ganda Fide avait, entre autres, souci de certaines parties de l’Europe où le catholicisme était inexistant ou affronté à des difficultés profondes. Evêques et Missionnaires traitaient avec cette instance ecclésiale, la Propaganda Fide, afin d’obtenir par elle des pouvoirs plus étendus. Ainsi firent les Archevêques de Bordeaux, de même que saint Vincent de Paul, saint Louis-Marie Grignion de Montfort et, après le P. Chaminade, son ami bordelais le P. Pierre-Bienvenu Noailles, fonda­teur de l’Association des Soeurs de la Sainte Famille et des Pauvres Prêtres. Il y avait donc, spécialement à Bordeaux, une tradition d’appel à cette Congrégation romaine [12].

Il faut ajouter que l’exercice concret de ces pouvoirs spécifiques était toujours soumis à l’approbation de l’Ordinaire du lieu. Sans l’évêque local, le Missionnaire apostolique ne pouvait rien faire dans le diocèse. Ainsi étaient respectées la hiérarchie et l’autorité de l’Eglise. Pour en donner un exemple, le P. Chaminade, en 1819, subordonne l’affiliation d’une Congrégation ma­riale à l’autorisation de Mgr l’Evêque. Il précise à M. Huard, curé de la paroisse qui demandait cette af­filiation : Si Mgr du Mans ne ratifiait pas, je tiendrais l’Affiliation pour nulle : rien n’est va­lable que dans l’ordre de la mission instituée par Jésus Christ [13].

Une situation ecclésiale typique

Les documents de nomination du P. Chaminade comme Missionnaire apostolique ne nous sont malheureusement point parvenus. Mais à travers ses multiples allusions à ce titre et à la Lettre qui l’accompagnait, nous pouvons mieux comprendre l’ampleur de la vocation mission­naire de notre Fondateur [14].

Il désirait un titre qui puisse le situer en Eglise, mais qui soit plus large que les fonctions proprement ecclésiastiques de vicaire ou de curé ou d’autres assimilées. Sa vocation mission­naire, il en était intimement convaincu, le poussait à trouver une situation qui lui permît de dé­passer les limites d’une paroisse ou d’un seul diocèse. Les diverses fondations qu’il allait entre­prendre auront toutes un caractère catholique c’est-à-dire universel. Il entrevoyait déjà que plus tard, quand il aura fondé les œuvres que Dieu lui avait inspirées à Saragosse ou peut-être déjà à Mussidan, il lui faudra une sorte de délégation à ampleur ecclésiale pour étendre ses fonda­tions d’abord au-delà du diocèse, celui de Bordeaux ou celui d’Agen, dans la France entière, puis dans le monde entier. Le titre de Missionnaire apostolique était pour lui comme néces­saire à sa vocation. Le futur fondateur se devait de le demander à Rome.

De plus, en vue de cet appel missionnaire universel, il lui fallait des pouvoirs que l’Archevêque d’Auch ne pouvait pas lui accorder car ils dépassaient sa juridiction. Là encore la Lettre de Missionnaire apostolique qui accompagnait chaque nomination, venait lui apporter une solution adéquate. Cette lettre ne nous est pas non plus parvenue. Les allusions qu’y fait le Fondateur nous permettent d’entrevoir son importance et pour le développement de la Congrégation mariale des laïcs et pour la fondation puis l’extension des Instituts religieux.

Le titre et la qualité de Missionnaire apostolique apportaient donc au P. Chaminade comme le cadre ecclésial dans lequel pouvait se développer sa vocation missionnaire-mariale universelle.

Missionnaire apostolique et fondateur

L’histoire nous montre que la plupart des Missionnaires apostoliques ont exercé leur mis­sion à titre personnel, très souvent par la prédication de missions paroissiales. L’option du P. Chaminade, dès son retour en France, est différente : il veut partager avec les chrétiens son titre de Missionnaire. En effet, son intime conviction est que tous les membres de l’Eglise, par leur baptême et leur confirmation, ont une vocation apostolique, missionnaire. Il lui faut donc, sous l’inspiration divine, créer des lieux d’Eglise où les chrétiens puissent se rassembler et vivre, dans la variété des situations, leur vocation missionnaire baptismale.

Une Congrégation mariale nouvelle

Aussi commence-t-il par refonder la Congrégation mariale pour les laïcs. Elle est un héri­tage des Jésuites qui l’ont fondée dans leurs collèges dès le 16° siècle. G.-Joseph Chaminade en fut membre avant la Révolution, durant ses années d’étudiant à Bordeaux. Il la connaît par l’intérieur, ce qui lui permet de l’adapter aux conditions nouvelles post-révolutionnaires. Il aime citer à ce sujet une parole biblique : Le Seigneur a choisi de nouvelles manières de com­battre, Nova bella elegit Dominus (Jg 5, 8). Mais laissons-lui la parole. Il s’adresse, en 1814, à Adèle de Trenquelléon qui sera avec lui la Fondatrice des Filles de Marie :

Je rentrais en France, il y a quatorze ans, avec la qualité de Missionnaire apostolique dans toute notre malheureuse patrie, sous l’autorité néanmoins des Ordinaires des lieux. Je ne crus pas pouvoir mieux en exercer les fonctions que par l’établissement d’une Congrégation telle que celle qui existe. Chaque Congréganiste, de quelque sexe, de quelque âge, de quelque état qu’il soit, doit devenir membre actif de la mission [15].

A la réception de cette lettre, Adèle écrit sa joie à ses amies de la Congrégation :

Chaminade nous marque le but de sa Congrégation qui est d’être de petites Missionnaires, chacune dans notre état. Je vous avoue que ce terme m’exalte [16].

La Congrégation mariale, telle qu’elle existe en ces premières années du 19° siècle, est donc bien la première œuvre du Missionnaire apostolique. Elle s’adresse à tous les membres de l’Eglise : jeunes gens et jeunes filles, hommes et femmes, adolescents et prêtres. Un réel es­prit mission­naire anime cette institution qui comptait à Bordeaux, en 1805, plus de 600 per­sonnes. Son esprit était courageusement missionnaire :

Dans notre siècle, à l’époque de renouvellement où nous sommes, la religion demande autre chose de ses enfants. Elle veut que tous, de concert, secondent le zèle de ses Ministres, et, diri­gés par leur prudence, travaillent à la relever. C’est cet esprit qu’on inspire dans les nouvelles Congrégations. Chaque Directeur est un missionnaire permanent, chaque Congrégation une mission perpétuelle [17].

Les Instituts religieux

De la Congrégation vont naître, en 1816 et en 1817, deux Instituts religieux, l’un, à Agen, de la Congrégation des jeunes filles avec Adèle de Trenquelléon, les Filles de Marie, et l’autre, à Bordeaux, de la Congrégation des jeunes gens, la Société de Marie. De l’arbre planté en 1800, le Missionnaire apostolique recueille de nouveaux fruits : des Religieuses et des Religieux qui, issus des Congrégations, vont partager avec une plénitude plus grande, la Mission de leur Fon­dateur et Père.

Si chez les Filles de Marie, malgré des difficultés, le charisme missionnaire s’est déve­loppé normalement sous l’influence de Mère Marie de la Conception (Mère Adèle de Tren­quelléon), il n’en fut pas de même dans la Société de Marie. Autour de 1832, celle-ci passait une crise qui opposait, plus ou moins, certains anciens religieux au Fondateur lui-même. Celui-ci leur rappelle inlassablement qu’il n’a jeté les fondations de la Société de Marie que comme Missionnaire apostolique [18]; qu’il a toujours agi en vertu d’un Bref de Missionnaire aposto­lique, re­connu spécialement par le Métropolitain dans le diocèse de Bordeaux et dans la Novempopolanie (Auch) [19].

Le Tiers-Ordre régulier des Filles de Marie

Nous savons que l’Archevêque d’Auch avait fait passer à Rome la demande de Mis­sionnaire apostolique formulée par le P. Chaminade. Voici qu’en 1836, au retour d’une longue visite des communautés religieuses du Nord-Est, le Fondateur descend jusqu’à Auch. Il y est accueilli par Mgr Joachim-Jean-Xavier d’Isoard. Le 1 septembre, le Tiers-Ordre régulier des Filles de Marie y est constitué officiellement par le P. Chaminade, au titre de Missionnaire apostolique. En fait, il vient incorporer dans l’Institut des Filles de Marie, sous le titre de Sœurs compagnes, les Directrices actuelles de la Maison départementale de Secours et autres jeunes per­sonnes qui ont manifesté le désir de se dévouer, sous la protection de Marie, en menant une vie toute religieuse, au soin des malades et à l’instruction des jeunes personnes de leur sexe [20]. Ce fai­sant, le Fondateur réalise un des désirs cher à Mère de Trenquelléon : l’œuvre des campagnes [21]. Elle-même est née à la campagne et s’y est dévouée durant sa jeunesse. Elle avait toujours rêvé de petites commu­nautés religieuses implantées dans les villages, au service des paroisses par l’école et le soin des malades.

Ce rapide survol de 35 années du P. Chaminade montre clairement qu’il avait une voca­tion de Fondateur. Bien plus, que toutes ses fondations successives et complémentaires les unes des autres, sont des actes caractéristiques du Missionnaire apostolique. Cette nomination, de­mandée par lui-même, approuvée par le Saint-Père et délivrée par la Congrégation de la Propa­ganda Fide, fut vraiment la source et la justification de l’action de celui qui fut appelé par Dieu à être, non seulement un serviteur de la foi chrétienne, mais un multiplicateur de mission­naires dans l’Eglise de Jésus Christ.

Les dynamismes missionnaires

Toutes les fondations du P. Chaminade ont eu comme visée essentielle de vivre les dy­namismes missionnaires de leur Fondateur. N’est-ce pas le propre de la grâce charismatique de toute fondation en Eglise ? La structure même donnée aux diverses fondations entraînait une manière typique d’exprimer et de vivre la mission selon le charisme du Missionnaire apos­tolique. Avec le temps, avec l’approfondissement des engagements, l’esprit missionnaire allait encore s’enrichir et mieux manifester le visage d’une Eglise au dynamisme missionnaire-marial. Celui-ci rassemblait en une unité nouvelle plusieurs choix caractéristiques qu’il faut rapidement évoquer maintenant.

Des communautés missionnaires

En rentrant de l’exil, le P. Chaminade portait en lui le souci permanent de prendre sa part à la reconstruction de l’Eglise en France, de lui redonner, après dix ans de persécution, un visage renouvelé, ouvert à l’avenir. Pour lui, l’Eglise est une communauté missionnaire compo­sée de croyants courageux et unis. Dans les premières communautés laïques qu’il a fondées, le P. Chaminade voulait accueillir d’abord les chrétiens qui avaient vécu la dispersion par la persécu­tion. Il fallait leur redonner courage et confiance ; leur faire faire l’expérience que l’union fait la force, qu’ils sont capables d’affronter ensemble un monde souvent hostile à la foi chrétienne. Le mot qui est le plus fréquent dans les textes sur la Congrégation est certainement celui de zèle. Car, il est précisé à ceux qui forment les candidats à la Congrégation : Dès les commencements il faut leur inspirer ce zèle qui distingue le Congréganiste du chrétien ordinaire ; et un des meilleurs moyens c’est de leur faire faire des œuvre de zèle [22].

Une autre expérience va se développer au sein de cette communauté missionnaire laïque. Elle devenait attirante même pour ceux qui avaient délaissé la foi et la fréquentation des sa­crements, et qui n’osaient pas franchir le seuil de leur église paroissiale de peur d’être montrés du doigt. Les Congréganistes les accueillaient volontiers dans leur Oratoire, l’église de la Ma­deleine, et dans les lieux de réunion attenants. Ils les entouraient, les initiaient aux vérités es­sentielles de la foi et à la prière. La Congrégation avait fait l’option des plus pauvres par rap­port surtout à la foi chrétienne.

Cette expérience supra-paroissiale pouvait être mal perçue par certains curés qui voyaient les meilleurs de leur paroissiens fréquenter l’église de la Congrégation où le P. Cha­minade les réunissait, les formait, les encourageait à une action d’envergure et bien concer­tée. A ceux qui lui reprochaient ces méthodes dites nouvelles, le Missionnaire apostolique se conten­tait de répondre par une question pour lui fondamentale : Ne faut-il pas faire des chrétiens avant d’en faire des paroissiens ? Quelle clairvoyance pastorale et missionnaire ! N’a-t-on pas pu lire, lors du dernier Synode des Evêques d’Afrique à Rome, ce témoignage d’un Africain : On a fait de nous des catholiques avant de faire de nous des chrétiens. Décidément il faut tou­jours commencer par le commencement, les semailles, puis réunir les conditions pour per­mettre à la semence de grandir.

Marie, missionnaire au cœur de l’Eglise

La Congrégation de Bordeaux n’était pas mariale pour la forme. Son titre avait une pro­fonde signification. Marie, la Mère de Dieu et Mère de l’Eglise pouvait y tenir sa vraie place. Elle était, bien sûr, vénérée, honorée, célébrée selon la bonne tradition de l’Eglise.

Mais en plus, le Missionnaire apostolique inculquait aux siens des principes qui furent taxés de nouveaux et donc critiqués. Peu importe. Il était sûr de son chemin. Dieu le lui avait inspiré, répétait-il souvent. Il aimait à contempler la Vierge Marie chargée d’une mission ecclé­siale pour notre temps, celui d’après la Révolution. Il la voyait comme le moyen le plus puissant et celui qui nous est le plus cher. Les Congrégations nouvelles ne sont pas seulement des associa­tions à l’honneur de la Sainte Vierge : c’est une sainte milice qui s’avance au Nom de Marie et qui entend bien combattre les puissances infernales sous la conduite même et par l’obéissance de Celle qui doit écraser la tête du serpent [23].

Il est à remarquer que le P. Chaminade situe Marie au cœur même de l’Eglise envers la­quelle et avec laquelle la Mère du Sauveur doit remplir sa mission maternelle. Vatican II en Lumen gentium au chapitre 8 désigne ce rôle de Marie comme le munus maternum, le rôle ma­ternel, et le montre comme complémentaire du munus paternum qui est le rôle des évêques et du sacerdoce minis­tériel. Ces deux charges ecclésiales ne peuvent être séparées l’une de l’autre, car ensemble elles sont nécessaires à la croissance du Corps du Christ. Mais on peut, par un choix charismatique, être attiré plus par l’une que par l’autre. C’est ainsi que le prêtre Chami­nade partage son charisme de Missionnaire apostolique de préférence avec des laïcs et des reli­gieux.

Ce choix lui était inspiré par sa découverte de Marie et de sa mission spécifique dans l’Eglise de la charité, comme s’exprimait le Cardinal Journet dans son étude sur l’Eglise du Verbe incarné. Car, avec Marie, une Laïque, notre mission est orientée vers la vie et le dévelop­pement de la communauté ecclésiale. L’état de vie de laïc est la base même de l’Eglise, car tous, même le Pape, commencent par être des baptisés, confirmés, pardonnés et nourris de l’Eucharistie. La mission telle que la vit le P. Chaminade nous apprend à travailler à la base, d’éveiller des communautés de base où la semence divine doit être soignée afin qu’elle gran­disse, produise ultérieurement beaucoup de fruits. Une telle vue justifie également l’option que le Fondateur a toujours faite en faveur des jeunes, au point que Marie, surtout durant les pre­mières années de la Congrégation de Bordeaux, était invo­quée sous le titre de Mère de la jeu­nesse.

Un dynamisme de sainteté

Tout charisme étant don de l’Esprit Saint, doit nécessairement s’exprimer par une pro­gression dans la sainteté. En étudiant chronologiquement l’ensemble des textes chaminadiens sur la Congrégation, on est frappé de la ferveur qui animait ce groupe de plusieurs centaines de personnes. Là encore la grâce et l’expérience avaient fait saisir au Fondateur un principe au­quel il tenait beaucoup : union sans confusion. Chacun à sa place, à sa bonne et vraie place, avec la possibilité de progresser selon ses fidélités à l’Esprit et l’approfondissement constant d’une vie soucieuse du salut des autres. Avant Vatican II, le Fondateur des Marianistes travail­lait avec les siens à faire advenir l’Eglise comme «sacrement de l’union à Dieu et de l’unité entre les hommes».

En ses premières années, la Congrégation de Bordeaux était composée en presque tota­lité de laïcs chrétiens : l’Eglise de la base. A partir de 1804, un groupe de prêtres congréga­nistes prit forme et place dans l’ensemble. L’image de l’Eglise était alors complète : laïcs et prêtres en une même famille que l’on aimait à appeler la Famille de Marie, l’Eglise qui aime se rassembler autour de Marie, la Mère de Jésus proclamée par le Sauveur en croix Mère de son Eglise.

Arrivent les tribulations et la persécution. En novembre 1809, Napoléon supprime la Congrégation sur tout le territoire national. Si elle ne peut plus paraître au grand jour, la Congrégation de Bordeaux maintient sa vie, sa cohésion, son réseau serré de relations frater­nelles grâce à un judicieux partage des responsabilités. Son dévouement missionnaire doit se faire plus discret, plus personnalisé. Par contre, la vie spirituelle des Congréganistes s’ap­profondit.

Le Missionnaire apostolique est sollicité par des demandes nouvelles, inédites, mais at­tendues par lui, car elles vont dans le sens de son inspiration de Mussidan et surtout de Sara­gosse. Certains jeunes, garçons et filles, parlent à leur Directeur d’attraits pour les conseils évangéliques vécus dans une vie dite religieuse mais par des chrétiens dispersés dans le monde. Rien de cela ne filtre dans le domaine public. Le secret est bien gardé et pour cause ; la police impériale tient à l’oeil le P. Chaminade. Celui-ci jette, au fur et à mesure des nécessités, ses vues, projets ou débuts de réalisations sur des feuilles volantes qui nous sont parvenues. Elles témoignent d’essais divers, d’engagements variés pris par certains membres de cette Congré­gation officiellement dissoute et pourtant bien vivante.

« Union sans confusion »

A la reprise, lors de la première Restauration, en 1814 d’abord, puis définitivement à par­tir de 1815, cette Congrégation, devenue plus intensément Eglise-missionnaire, resurgit rapi­dement de l’ombre. Il lui suffit de quelques réunions pour tout remettre en route. En 1815, grâce à une analyse fort précise [24], le Fondateur discerne dans la Congrégation renaissante trois états de vie :

  1. L’état du simple Congréganiste. Etat de laïcs missionnaires qui représentent la plus grande partie de la Congrégation. Les cinq groupes qui se sont constitués durant les premières années : jeunes gens, jeunes filles, hommes, femmes et prêtres revivent. Ils se réorganisent selon une Convention qui sera comme la charte de cette seconde période de la Congrégation (1815-1830). Une Introduction à l’état du Congréganiste présente cet état de vie dans le Manuel de 1815.
  2. L’état des Congréganistes qui s’attachent à vivre personnellement et aussi par petits groupes les conseils évangéliques. Ils sont en rapport avec le Directeur et avec un responsable laïc, un des leurs. Chacun a son règlement de vie personnel et reçoit un ordre de semaine. Ils ne sont pas appelés à faire plus mais à faire mieux. Une promesse ou un vœu d’obéissance ainsi qu’une promesse d’attachement et de dévouement à la Congrégation, les lient au Directeur et à leur oeuvre commune. Engagés plus personnellement, ils sont davantage disponibles pour la mission dont ils ont fait leur état de vie de laïcs.
  3. L’état des Congréganistes religieux dispersés dans le monde. Leur groupe est, avant l’heure, un Institut séculier. Ce dernier état était le seul auquel on donnait jusqu’à présent, dans la tradi­tion marianiste, le nom de «Etat». Mais nous venons de voir qu’il y avait trois états qui structu­raient la Famille de Marie avant la création même des Instituts religieux. Quant à ce troisième état, celui d’une vie consacrée vécue par des Congréganistes dispersés dans le monde, il n’était, dans la pensée du P. Chaminade, qu’une préparation à la vie religieuse proprement dite. Il écrira bien plus tard, en faisant allusion à la difficile époque napoléonienne, époque où cet état de vie a commencé : Je taillais toujours quelques pierres éparses sur place. Je m’en servis pour fonder les Frères des Ecoles chrétiennes à Bordeaux et ensuite la Société de Marie [25].

Voilà donc les trois états de vie qui, tous trois, concernaient les laïcs au sein de la Congrégation de Bordeaux [26]. En 1816 et 1817, les deux Instituts religieux vont prendre nais­sance. Cet ensemble de fondations manifeste clairement quelle Eglise voulait promouvoir le Missionnaire apostolique : l’Eglise de la charité, dans laquelle sont engagés ensemble des laïcs animés du même souffle missionnaire-marial, des prêtres et des religieux, chacun selon son état de vie et sa grâce propre. Et cette Eglise de la charité ne pouvait se concevoir et se réaliser, pour le P. Chaminade et les siens, qu’autour de Marie, Mère et Educatrice de la foi, et en al­liance avec Elle.

Quelques expressions de ce dynamisme missionnaire

Pour illustrer ce qui vient d’être rappelé, arrêtons-nous à quelques-unes des expressions typiques du P. Chaminade Missionnaire apostolique. Elles sont éparses dans ses écrits et on les voit apparaître à des moments différents, selon les besoins.

Le verbe « faire »

Il est fréquent sous la plume du Fondateur à toutes les époques de sa vie. Je me permets ici de vous renvoyer à : Connaître, aimer, servir Marie. Pour chacun de ces trois verbes caracté­ristiques de la marialogie du Fondateur, j’ai rencontré son ouverture sur autrui : faire connaître, faire aimer, faire servir Marie.

Ce verbe «faire» exprime le tempérament d’un homme actif et engagé du missionnaire entièrement dévoué au service de l’Evangile à répandre, à communiquer. Nous ne pouvons garder pour nous-mêmes ce que nous avons reçu gratuitement. Il nous faut, dit le Seigneur, donner gratuitement. Plus haut nous avons rencontré cette réponse aux curés de Bordeaux et d’ailleurs : faire des chrétiens pour que vous ayez des paroissiens. Le verbe faire désigne ici une sorte de maternité ecclésiale à l’image de celle de Marie et en coopération avec elle : faire naître et grandir des chrétiens qui pren­dront leur place dans l’Eglise. Les familles chrétiennes ne sont-elles pas spécialement concer­nées par ce dynamisme missionnaire vécu dans l’amour conjugal et familial ?

Avec le développement du deuxième et du troisième état, présentés ci-dessus, apparaît dans les écrits chaminadiens une nouvelle expression d’activité missionnaire : multiplier les chrétiens. Elle deviendra typique du Missionnaire apostolique qui l’unit fréquemment à son dé­sir d’étendre la foi chrétienne, car, écrit-il à une communauté, nous sommes tous appelés à la propagation de la foi, chacun dans le poste qui lui est assigné à cet effet [27].

Instruire et enseigner

La foi [28], pour le P. Chaminade, fait l’objet d’un enseignement. Elle s’adresse à l’esprit, passe par le cœur et devient vie des chrétiens. Deux mots veulent exprimer cet ensemencement de la foi, celui d’instruire, instruction et celui d’enseigner. Le premier est très utilisé chez les Congréganistes laïcs. Il désigne de multiples démarches qui vont de la conversation quoti­dienne à l’instruction donnée dans les assemblées et réunions de la Congrégation [29].

Les termes «enseigner» et «enseignement» sont plus usités parmi les religieux et les reli­gieuses. Ils prennent leur signification missionnaire dans une traduction française de la der­nière recommandation de Jésus : Allez, enseignez toutes les nations. Enseigner est donc d’abord enseigner l’évangile en le disant et en le pratiquant. Ce mot n’est jamais à rétrécir à son sens strictement scolaire. Car la Société de Marie, comme les Apôtres, est un corps essentiellement en­seignant, c’est-à-dire essentiellement missionnaire dans l’universalité de ses membres [30]. Il suffit de voir ce qu’il signifiait dans le cinquième vœu des deux Ordres religieux marianistes : le vœu d’enseignement de la foi et des mœurs chrétiennes [31].

« Vous êtes tous missionnaires ! »

Cette phrase est peut-être celle qui est la plus souvent citées pour évoquer et affirmer la largeur de la vision missionnaire de nos Fondateurs. L’expression a pris forme progressivement surtout dans la correspondance avec Adèle de Trenquelléon. En une première ouverture, en 1809, le P. Chaminade lui écrit à la fin d’une lettre :

Tout ce que j’ai pu faire pour vous, je l’ai fait, à moins que vous ne vouliez qu’en qualité de Missionnaire apostolique pour la France, je ne vous adopte toutes pour mes Enfants ; mais ne l’ai-je pas déjà fait en quelque manière  ? [32]

A la source du «vous êtes tous missionnaires» cette lettre nous dévoile qu’il y a une rela­tion spirituelle paternelle-filiale entre le Missionnaire apostolique et tous les membres de la «petite société» d’Adèle. Cette attitude d’amour réciproque restera jusqu’à la fin de la vie du «bon Père» la relation essentielle de la Famille marianiste : l’esprit de famille.

En 1814, nouvelle affirmation : Chaque Congréganiste. . . doit devenir membre actif de la mission [33]. Et voici, dans la perspective de la fondation religieuse, notre expression : Votre com­munauté sera toute composée de religieuses missionnaires. C’est d’après ces vues que nous devons distinguer les sujets qui sont propres à cet état [34]. Les Filles de Marie seront une communauté où toutes les religieuses seront effectivement missionnaires à la manière dont le Missionnaire apostolique comprend, vit et fait vivre sa propre mission.

Et voici la lettre la plus intéressante et la plus explicite du Missionnaire apostolique à ses frères découragés par les difficultés quotidiennes et quelques supplémentaires. Elle est adres­sée au P. Chevaux, à Saint-Remy. Quelques extraits :

Vous êtes de vrais missionnaires. . . L’enseignement n’est qu’un moyen dont nous usons pour remplir notre mission, pour introduire partout l’esprit de foi et de religion et multiplier les chrétiens. . .

Vous êtes tous des missionnaires, remplissez votre mission ! Peut-être le nom de «mission» pourra-t-il fatiguer l’imagination de plusieurs s’imaginant que, pour être missionnaire, il faut aller prêcher de ville en ville, de paroisse en paroisse, ne s’étant pas formé l’idée d’une mission stable et permanente. Il faut rectifier à ce sujet toutes les idées qui n’y seraient pas conformes [35].

Je me permets de souligner ici la dernière phrase. Elle donne la clef de l’expression «tous missionnaires» pour le P. Chaminade : ses disciples doivent partager sa propre vision de la mission et suivre son propre engagement pour réussir leur vocation marianiste. Tous mission­naires signifie que nous sommes tous associés à la mission telle que le Fondateur la conçoit, telle qu’il en a reçu révélation de Dieu et telle qu’elle lui fut confiée par l’Eglise. Avec lui, tous les siens forment une seule et même Famille missionnaire, ayant un même esprit mission­naire [36]. Autrefois comme aujourd’hui, notre mission marianiste est une mission partagée avec nos communs Fondateurs, une mission stable, permanente et universelle. Peu de Missionnaires apostoliques, au cours de ces quatre derniers siècles, sont allés si loin dans le partage de leur mission reçue du Saint-Siège par la Congrégation de la Propaganda Fide.

« Missionnaires de Marie »

Cette expression semble la dernière-née de toutes celles que le P. Chaminade nous a lé­guées. Elle se lit dans la lettre aux prédicateurs de retraite de 1839 [37]. Les bases doctrinales de cette expression sont des plus anciennes, mais la forme synthétique qu’elle a prise sous la plume de Narcisse Roussel, rédacteur de la lettre, semble être de ce dernier. Peu importe l’origine. Le P. Chaminade l’a accueillie et la reprendra lui-même dans sa correspondance.

Elle a un lien particulier avec une autre phrase mise en relief dans la même lettre aux prédicateurs : Faites tout ce qu’il vous dira (Jn 1, 5). Ici nous sommes face à un héritage que le Missionnaire apostolique a fait de la part du Père de Clorivière, Jésuite. Sa présence dans nos textes date donc de 1814 environ et elle est liée, elle aussi, à la fondation des Filles de Marie [38].

Au-delà de son histoire, ce qui nous importe c’est la signification et le dynamisme mis­sionnaire qui se dégage de cette dernière expression, dans la mesure même où nous cherchons à l’approfondir. Elle relie explicitement, en quelques mots, la mission ecclésiale et la mission de Marie dans cette même Eglise Corps du Christ. De ce fait, se trouve évoquée l’Alliance que tout Missionnaire selon le P. Chaminade doit faire avec Marie pour le service de l’Eglise.

Selon le Fondateur, ce titre de missionnaire de Marie peut être vécu par tous les membres de la Famille marianiste, qu’ils soient laïcs, prêtres ou religieux. Grâce à cette appartenance à Marie et par l’Alliance qui la scelle, tout membre de la Famille est missionnaire en lien avec Marie-Missionnaire. «Etre» missionnaire est bien plus profond et plus exigeant que de poser parfois un acte missionnaire. «Etre». De jour et de nuit, toujours et partout, en tout ce que nous entreprenons, nous sommes missionnaires. Missionnaires parce que nous appartenons à la Famille de Marie et, par là, à Marie elle-même. Quelle force et quelles perspectives !

Notre œuvre est grande, elle est magnifique. Si elle est universelle, c’est que nous sommes les missionnaires de Marie qui nous a dit : «faites tout ce qu’il vous dira !» Oui, nous sommes tous missionnaires. A chacun de nous la Sainte Vierge a confié un mandat pour travailler au salut de nos frères dans le monde [39].

Nos convictions communes

Ce mandat d’Eglise, nous pouvons tous le réaliser, que nous soyons religieux, séculiers ou laïcs marianistes, à condition que nous fassions nôtre l’esprit missionnaire qui nous est commun et qui a valeur universelle, comme vient de le rappeler ce dernier texte du P. Chaminade. On peut résumer cet esprit en trois convictions qui sont inspiratrices de toute vie chré­tienne ma­rianiste [40] :

  1. Agir au nom de Marie. Cela ne peut se faire que dans la mesure où nous croyons à la mission de Marie qui se traduit par toute mission d’Eglise, mais particulièrement par tout ce qui, de près ou de loin, est éducation de la foi en Jésus Christ. Vivant cette conviction, nous pouvons compter sur Marie, sachant que nous communions à sa mission grâce à l’alliance que nous avons contractée avec Elle. Elle dans l’invisible, nous dans le visible, nous sommes engagés en­semble à multiplier les chrétiens. Nous sommes ainsi les auxiliaires et les instruments de la très Sainte Vierge dans la grande œuvre de la réformation des mœurs, du soutien et de l’accroissement de la foi, et par le fait, de la sanctification du prochain [41].
  1. Agir comme Marie. Vouloir agir non seulement en son nom, mais en intime union avec elle, comme elle, voilà à quoi nous invite aussi notre alliance avec Marie. De la sorte Marie elle-même peut agir mystérieusement à travers notre activité, la faire sienne plus explicitement. Rien ne traduit mieux cette communion de vouloir et d’action que l’intimité qui unit récipro­quement la Mère et ses enfants. La contemplation de la Mère de Jésus dans les évangiles peut nous permettre d’approfondir cette conviction. Ses humbles vertus, sa vie obscure à Nazareth, sa fermeté dans la foi, sa charité dans le quotidien, voilà ce que chacun de nous est appelé à vivre pour agir comme Marie.
  1. Faire connaître, aimer et servir Marie. Cette trilogie résume pour le P. Chaminade le dé­vouement à but marial. Cette troisième conviction est comme le fruit des deux précédentes. Comme l’écrit le Fondateur au P. Lalanne : Dans la mesure où votre dévotion envers Marie croî­tra, vous serez apte à l’inspirer aux autres [42]. Nous sommes invités à partager avec tous les chré­tiens les convictions mariales qui nous font vivre car elles sont un bien de l’Eglise universelle comme l’attestent désormais clairement les huit chapitres de Lumen gentium. Ainsi pourra se réaliser ce que l’Esprit Saint fait dire à Marie dans le Magnificat : Toutes les générations désor­mais me proclameront bienheureuse.

 

Le legs du Père Chaminade Missionnaire apostolique pourrait donc se résumer en ceci :

¦ travailler ensemble à faire advenir,

¦ dans le souffle de l’Esprit de la Pentecôte et sous l’action de Marie,

¦ une Eglise dans laquelle Marie, la Mère de Dieu et des hommes, ait sa place et puisse ac­complir, à travers tout chrétien, sa mission maternelle en faveur de tous les hommes.

Nous serons alors fidèles et au Fondateur et au Concile Vatican II qui affirme pour tous les chrétiens :

L’Eglise, en son travail apostolique, regarde avec raison vers celle qui engendra le Christ, conçu de l’Esprit Saint et né de la Vierge Marie, afin qu’il naisse et grandisse égale­ment dans le coeur des fidèles par le moyen de l’Eglise. La Vierge fut dans sa vie un modèle de cet amour maternel dont doivent être animés tous ceux qui, associés à la mission aposto­lique de l’Eglise, coopèrent à la régénération des hommes [43].

Une mission qui continue

Tout ce qui précède met en lumière l’actualité du charisme missionnaire du Père Chami­nade. Lui-même en avait une vive conscience. Il se savait Missionnaire apostolique non seule­ment pour son temps, mais pour l’Eglise des temps à venir. N’écrivait-il pas, en 1824 déjà, à propos de ses Instituts religieux qui devaient être les garants de son charisme par rapport à sa Congrégation mariale :

L’expérience nous a fait comprendre à cet égard que, pour un Directeur de Congrégation, il faut encore plus que nous n’avons dit : il faut un homme qui ne meure point, c’est-à-dire une société d’hommes qui se seraient donnés à Dieu pour cette oeuvre, qui la rempliraient dans la maturité de leur âge, après s’y être formés sous la sainte obéissance, et qui se transmettraient les uns aux autres le même esprit et les mêmes moyens. Ce sont ces vues qui ont donné nais­sance à l’Institut de Marie. Que l’Esprit de Dieu conduise toujours à ses desseins ce qui a été entrepris pour sa seule gloire ! [44]

Cette volonté de continuité, le Fondateur a voulu l’inscrire, à la fin de sa vie, dans les structures de ses fon­dations. En même temps qu’il présentait à Rome, en 1838, ses deux Insti­tuts religieux pour en obtenir une approbation officielle, il demandait plusieurs autres faveurs dont celle-ci : pour ses successeurs, le titre et la qualité de Missionnaire apostolique, dont il a le bonheur d’être lui-même. Mais à Rome les choses avaient évolué au sujet des Missionnaires apostoliques [45]. La demande du Fondateur ne fut pas celle qu’il attendait, savoir une nomina­tion, comme la sienne, donnée par la Propaganda Fide. Mais l’essentiel fut acquis : tous les Su­périeurs généraux qui succéde­ront au P. Chaminade dans cette charge seront revêtus, et cela à perpétuité, du titre de Missionnaire apostolique, avec jouissance de tous les privilèges attachés à cette qualité.

Cette réalité permanente de Missionnaire apostolique dans la Famille marianiste ne doit pas devenir un simple organe témoin d’un passé révolu. C’est pourquoi nous devons prêter at­tention au commentaire qu’en fit le Fondateur lui-même. Dès la réception du Bref pontifical, il se sent obligé d’en exprimer l’esprit dans une lettre aux prêtres de la Société de Marie à qui il avait d’autres faveurs pontificales à communiquer :

Vous admirerez surtout l’insigne privilège accordé à tous les Supérieurs généraux mes succes­seurs. Le titre et la qualité de Missionnaire apostolique, dont j’ai l’honneur d’être revêtu moi-même, leur rappellera à jamais, ainsi qu’à vous, que notre oeuvre est une mission, un écou­lement et une participation de l’apostolat de Jésus Christ. Nous sommes tous missionnaires ; les simples Frères laïcs et les religieuses Filles de Marie sont aussi missionnaires : tous mis­sionnaires catholiques, avoués du Saint-Siège.

Il fallait donc que le premier Supérieur, dont les prêtres et les laïcs, soit de la Société, soit de l’Institut, ne sont sous ce point de vue que les vicaires ou les délégués, fût plus spécialement avoué du Souverain Pontife, et reçût de lui le caractère sacré de la mission qu’il exerce de sa part, par lui-même et par les siens, dans l’Eglise de Dieu. Voilà pourquoi j’ai demandé cette faveur, et voilà ce qu’elle signifie dans la pensée du Bref pontifical [46].

Ce texte précieux nous sert de conclusion. Il souligne que notre mission est une suite, une participation de la mission de Jésus. Elle prend donc sa source dans l’amour infini du Père qui a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son Unique. Tout acte missionnaire vient origi­nellement du cœur de Dieu et retourne à lui. Ce texte rappelle aussi que notre mission s’in­tègre dans celle de l’Eglise catholique. Prenant naissance dans cette double source, notre mis­sion nous revêt, aujourd’hui encore, d’un caractère sacré, analogue à un caractère sacramen­tel. Ainsi sommes-nous constitués, explicitement et par une grâce de Dieu et par une reconnais­sance d’Eglise, participants de la Mission même du Sauveur. Oui, tous ensemble et chacun à sa place, dans l’Eglise de Jésus Christ, les laïcs et les religieux marianistes sont Missionnaires de Marie auprès de tous les peuples.

 

[1] . Simler J., Guillaume-Joseph Chaminade, Paris, Bordeaux, 1901, p. 18-19; Lettres de M. Chaminade (désormais : LC), VII, n° 1510, p. 629-640, du 18.10.1848
[2] . Verrier J., Jalons, I, chap. VI, notes 35 et 41, p. 73, éd. française ; Simler, p. 19-20
[3] . Article «Jésuites» dans Catholicisme, col. 735.
[4] . Cité par Charles Berthelot du Chesnay, Les missions de saint Jean Eudes, Paris, Procure Eudiste, 1967, p. 185.
[5] . Cité par Sicard A., Le clergé de France pendant la Révolution, Paris, 1912, t. III, p. 474.
[6] . Armbruster J.-B., Connaître, aimer, servir Marie, (désormais : CAS) p. 16-29.
[7] . 2° édition, Rome 1801.
[8] . LC. I. n° 22, p. 29, du 26.08.1800 à Mlle de Lamourous.
[9] . LC. I. n° 25, p. 35, du 19.06.1802, à Mgr d’Aviau, nouvel Archevêque de Bordeaux.
[10] . LC. II. n° 523, p. 476.
[11] . LC. IV, n° 1076, p. 374, le 16.09.1838.
[12] . Ces affirmations et les développements suivants s’appuient sur Raymond Darricau et Bernard Peyrous, Le Père Noailles et l’Association de la Sainte Famille, Histoire d’un charisme, Bordeaux, Sainte Famille, 1993, p. 171-173. Ces auteurs indiquent leur principale source : Congregationis de Propaganda Fide Memoria Rerum, 1622-1972, Rome, 1971-1976, 3 volumes.
[13] . LC I, 122, p. 214.
[14] . Voir un extrait latin des Lettres de Missionnaire apostolique dans LC. VIII. S. 122, p. 85, lettre du 25.06.1819 à Mgr l’évêque du Mans.
[15] . LC. I. n° 52, p. 87-88.
[16] . Lettres d’Adèle de Trenquelléon (désormais : LT) I. N° 250, p. 337-338.
[17] . Esprit de notre Fondation (désormais : EF), III. p. 237.
[18] . LC. III. n° 625, p. 150, du 21.05.1832 au P. Lalanne.
[19] . LC. III. n° 638, p. 176, du 31.07.1832 au Père Chevaux.
[20] . LC. III. n° 866, p. 651.
[21] . LT. II. n° 354, p. 73, du 16.12.1819. Voir aussi Armbruster J.-B., L’Etat religieux marianiste (désormais : ERM) p. 403-406.
[22] . Voir G.-J. Chaminade, Ecrits et Paroles, 1994, vol. I, Index thématique, au mot «zèle». Dans ce volume, sont publiés tous les textes du P. Chaminade sur la Congrégation.
[23] . EF. III. p. 238.
[24] . Voir ce texte très riche dans G.-J. Chaminade, Ecrits et Paroles, I, N° 91, p. 324.
[25] . LC. VII. n° 1510, p. 638-639, du 18.10.1848 à MM. Ramonet et Faye.
[26] . Ce schéma, peut-être nouveau pour certains, est le fruit d’une analyse plus fine de l’ensemble des textes sur la Congrégation, de 1800 à 1824, textes qui sont tous publiés dans G.-J. Chaminade, Ecrits et Pa­roles, volume I.
[27] . Voir ERM, p. 407-409.
[28] . Sur la dynamique de la foi, voir G.-Joseph Chaminade, Ecrits sur la Foi, Paris, Marianistes, 44, rue de la Santé, 1992.
[29] . Voir Ecrits et Paroles, vol. I, Index thématique.
[30] . LC. II. n° 388, p. 177, du 15.02.1826, au P. Pierre-Bienvenu Noailles.
[31] . Voir dans ERM. p. 386-388. Le dernier exposé de ce fascicule, celui du P. Bernard Vial, présente toute la plénitude de sens de ce vœu marianiste.
[32] . LC. I. n° 52, p. 87, d’avril 1809.
[33] . LC. I. n° 52, p. 87.
[34] . LC. I. n° 57, p. 98, du 3.10.1815.
[35] . LC. III. n° 725, p. 378, du 7.02.1834.
[36] . Voir comment le Fondateur le présente à la communauté de Saint-Remy : ERM. p. 276-278.
[37] . Voir ERM. p. 281-283 et p. 232-250.
[38] . Voir ERM. p. 383-385.
[39] . Voir ERM, p. 274-283.
[40] . Voir CAS, p. 165-176.
[41] . Voir ERM, p. 162-164.
[42] . G.-J. Chaminade, Ecrits Marials, II, n° 299.
[43] . Lumen gentium, chapitre 8, n° 65, fin.
[44] . G.-Joseph Chaminade, Ecrits et Paroles, volume I, p. 665.
[45] . Sur toute cette démarche romaine et sur la pensée du P. Chaminade et la référence des citations qui sui­vent, voir ERM. p. 303-308.
[46] . LC. V. n° 1193, p. 160, du 8.03.1840.

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