Estivales marianistes

Voici le texte de mon intervention au rassemblement des Communautés laïques marianistes, « Les Estivales », en août 2009, en France, à côté de Bordeaux.

Le tableau sociologique que j’en fais est un regard sur la société occidentale et plus particulièrement française. Je n’en ai volontairement pas souligné les aspects positifs, car je voulais développer ce qui pouvait être amélioré.

Tableau sociologique

• L’individualisme est le cancer de la société.

L’homme est le roi absolu, mais il est roi de lui-même uniquement !

Ce qui compte c’est :

• sa réalisation personnelle : corps, cœur, esprit :

* le corps : bien-être, hédonisme, sexe : « parce que je le vaut bien. . . parce que vous le valez bien »

* le cœur : émotion, captation

* l’esprit : culture à la carte, « supermarché » de la foi, ce que je pense est ma vérité ; qu’importe celle des autres, la vérité objective n’a plus droit de cité. Ce qui importe c’est d’être bien dans ses certitudes, qu’importe si mes attitudes gênent, font souffrir les autres.

Ce qui est important c’est de réussir sa vie à tout prix car nous n’en avons qu’une !

• Les conséquences de cet état de fait : personne n’est heureux !
• Les individualismes s’opposent : égoïsme, violence
• Le lien social se délite : il n’y a plus de projet communautaire de société (cf. politique)
• Que faut-il faire ?
• une révolution copernicienne spirituelle :

* l’homme n’est pas le centre du monde : il est dépendant socialement

* redécouvrir la fraternité humaine : « homme et femme, Dieu les créa », l’homme ou la femme ne constitue pas à soi seul l’intégralité de l’humanité, il y a une complémentarité dans une altérité

* Dieu est à l’origine de tout : cf. la Genèse, la recherche scientifique

* se recevoir de Dieu avec bonheur : l’homme est à l’image de Dieu (dépendance aimante)

* un projet de société ouvert au-delà de la mort : la communion avec Dieu Trinité.

Quelles réponses la spiritualité marianiste peut-elle apporter au monde par les laïcs qui en sont porteurs ?

L’originalité de la spiritualité marianiste consiste à faire de Marie celle qui introduit à la foi chrétienne.

• Lorsque le Père Chaminade, de retour d’exil fin 1800, avec comme projet de rechristianiser la France, arriva à Bordeaux le premier acte qu’il posa fut de constituer la Congrégation mariale, ancêtre de nos CLM.
• Il n’est pas rare aujourd’hui, parmi les chrétiens, de rencontrer des personnes qui ont une relation privilégiée avec Marie. Elle peut se trouver à divers niveaux :

* une réponse à un besoin affectif, un moyen de combattre la solitude très présente dans notre société ;

* le sentiment d’une proximité humaine par rapport à un Dieu qui semble lointain, parfois au détriment de la relation au Seigneur ;

* la découverte que Marie nous mène à son Fils ;

* pour nous Marianistes, le choix de faire alliance avec Marie pour se mettre, non seulement sous sa protection, mais aussi, au service de sa mission maternelle.

* En faisant référence au bref tableau sociologique par lequel j’ai commencé mon intervention, nous constatons que bien des personnes dans notre monde, sont en manque d’affection et se replient sur elles-mêmes. Elles pâtissent d’un manque d’affection humaine, mais aussi d’affection divine.

Qui mieux que Marie peut les introduire à l’une et à l’autre ?

Le texte fondamental, je dirais primordial, de la Parole de Dieu, pour nous, Marianistes, n’est pas celui des Noces de Cana, mais celui de Marie et Jean au pied de la Croix. Il nous faut commencer par celui-là car il consacre notre naissance et notre éducation spirituelle par Marie. Marie, à la demande de Jésus sur la Croix, prend Jean comme son enfant, et Jean l’accueille comme sa mère. A la suite de Jean, nous accueillons Marie comme notre mère spirituelle, qui, avec l’Esprit Saint, va nous aider à grandir dans la ressemblance à son Fils.

Certes, ce qui nous constitue enfants de Dieu, c’est le baptême, et notre appartenance à Marie découle de notre première appartenance à Dieu. Cependant, Marie est là pour nous accompagner au quotidien dans notre vie d’enfants de Dieu.

C’est précisément ce que vous laïcs marianistes pouvez apporter, me semble-t-il, à nos contemporains : faire découvrir la figure maternelle de Marie, qui par son exemple et par sa mission introduit à la découverte de son fils.

• Marie est une mère attentive: à Cana, voyant l’embarras dans lequel les nouveaux mariés vont se trouver, c’est elle qui anticipe et avertit son fils : découvrir la prévenance de Marie et son intercession est une source de bonheur que vous pouvez donner à nos contemporains tout en les invitant à s’ouvrir à la solidarité en rompant la solitude.
• Marie, une priante et qui discerne dans la prière et nous éduque par son exemple : « Marie méditait tous ces événements dans son cœur ». Savoir sortir de soi-même, prendre de la distance par rapport aux événements, ne pas laisser aller notre vie à la dérive selon les impulsions du moment. Autrement dit : réfléchir sa vie, une nécessité pour l’homme contemporain qui ne prend pas le temps de s’arrêter.
• Marie, une mère qui n’est pas captatrice, cf. Jésus retrouvé au Temple à 12 ans. Marie nous éduque pour nous-mêmes et non pour elle. Dans un monde où l’on éprouve souvent des amours possessives, Marie montre le vrai amour qui est don de soi sans forcément attendre une réciprocité.
• Marie, une mère qui nous montre son fils et nous invite à le suivre, car c’est lui et lui seul, le Chemin, la Vérité et la Vie qui nous mène à son Père dans l’Esprit. Elle favorise la nécessaire révolution spirituelle copernicienne qui nous sort du narcissisme et nous permet d’accueillir avec bonheur la dépendance aimante avec le Créateur.
• Marie, une mère dont la foi en son fils est contagieuse : cf. l’invitation de Marie aux serviteurs des Noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira ».
• Marie, une femme qui trouve la plénitude d’elle-même dans le don total d’elle-même :

* dans la joie : Annonciation, Visitation-Magnificat

* dans la douleur : au pied de la Croix où elle s’ouvre à l’accueil de sa maternité spirituelle. Combien de nos contemporains ne trouvent pas de sens à leur vie et à leurs souffrances ? Marie vit l’épreuve de la mort de son fils dans l’espérance : pour elle il y a déjà la vie ici-bas, et malgré la mort de son fils, sa vie à elle continue, elle accueille sa nouvelle mission. Mais il y a en plus chez elle, cette foi en une vie en Dieu après cette vie sur terre. Beaucoup de nos contemporains, et même des chrétiens, ne reconnaissent que notre vie terrestre. A la suite de Marie, vous, laïcs marianistes, avec délicatesse, vous pouvez ouvrir nos contemporains à l’Espérance et les inviter au don de soi dans leur vie quotidienne.

* Marie nous invite aussi à dire « oui » à Dieu, à être confiants en lui, persévérants dans notre vie quotidienne, à être fidèles dans nos engagements. Par votre vie, vous laïcs marianistes, vous pouvez montrer à nos contemporains que la fidélité est possible quand elle s’appuie sur la fidélité de Dieu.

* Marie nous invite au témoignage et au service : cf. Visitation-Magnificat

* annoncer la Bonne Nouvelle en elle, la Bonne Nouvelle en nous ;

* être au service de nos contemporains comme Marie auprès d’Elisabeth. Supprimer la bulle de l’égoïsme et ouvrir à la fraternité, à la communication entre les êtres et même à la communion entre eux. C’est un bon moyen de désarmer la violence et reconstruire le tissu social.